C.N.R.S.
 
Dictionnaire du Moyen Français (1330-1500)

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     COEUR     
FEW II-2 cor
COEUR, subst. masc.
[ ]

A. -

[Le coeur comme siège de l'affectivité]

 

-

À coeur joyeux rien ne peut nuire : L'HOMME MONDAIN. Au regard de moy, je ne pense Frs a vestir robe nouvelle,Me trouver en feste ou en dance, Puis servir quelque damoiselle. Ceux qui ont la puce en l'oreille N'ont soing que de jouer et rire, Car, vente, pleuve, gresle ou gelle, A cueur joyeux riens ne peut nuyre. (ALECIS, Déb. omme mond. P.P., c.1500, 142).

 

-

Coeur de femme est fléchant : Car il dist en son cuer et tout pour voir l'affie : Cuer de femme est flecquans, on l'a dit mainte fie, En poi d'eure est cangie [T eu. se change] (Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 163).

 

Rem. Morawski 435 : Cueur de femme est tost mué ; Hassell 110, F44.

 

-

De coeur dolent joie ne peut issir V. joie

 

-

En coeur de femme n'a rien de ferme V. femme

 

-

Coeur lié ("joyeux") ne pense que tambours ("bruit de tambours, bruit de fête") : A celle heure que je vous compte, Le temps joyeusement passoye ; Je ne tenoye de riens compte, A nulle chose ne pensoye Ou pend fillé ne ou pend soye Qu'on fait aux champs, qu'on fait aux bourgs : Cuer lyé ne songe que tabours. (TAILLEV., Passe temps D., c.1440, 135).

 

-

De la bouche sort ce que le coeur sent V. bouche

 

-

Face de prince éjouit le coeur. V. face

 

-

Femme montre plus de courroux au dehors qu'elle ne fait au coeur V. courroux

 

-

Folie fait asseoir son coeur là où il ne peut profiter V. folie

 

-

Hautesse en coeur frarin est richesse perdue V. hautesse

 

-

Folle est la femme qui a homme montre son coeur avant qu'elle ne l'ait éprouvé V. femme

 

-

Il n'est angoisse qu'en coeur convoiteux V. angoisse

 

-

Ire empêche le coeur de vérité savoir/dire V. ire

 

-

Ja ne sera vrai amoureux un coeur, s'il n'est un peu jaloux V. amoureux

 

-

Là où est le coeur, là est l'oeil : Vray est que souvent cilz disciples sont negligens ou refusent de nectoyer ceste escole ; Et ayment mieulz gerir [l. gesir (?)] et pourrir en leur ordure qui leur souffreroit ; et raison avec entendement en sont souvent cause, pour paresse ou fole compassion, comme on seult dire : dame piteuse fait fille tigreuse. Ilz sont compaignons ; ou le cuer est oyiel est. (GERS., 1406, Oeuvres complètes G., 1402, 1091).

 

Rem. Morawski 1020 : La ou est l'amour si est l'oeil ; Hassell 179, O11.

 

-

L'amour qui n'est pas de .II. coeurs aünée est chèrement achetée de l'une partie V. amour1

 

-

Langue mal sage épand les trésors du coeur V. langue

 

-

Le coeur dit bien ce qu'aventure amène : Quant la pucelle vit, qui fut doulce et humaine, La beaulté de son corps, le coeur de lui sourmaine, Tantost lui fut advis, quant il la vt prochaine, Qu'encor l'espouseroit en esglise haultaine. Et on dot bien souvent une raison certaine : Que le coeur dit moult bien ce qu'aventure amaine. (Theseus Cologne I, 2 B., c.1361-1374, 184).

 

-

Le friand goût réconforte le coeur V. goût

 

-

Nul ne peut mieux aimer que coeur de mère V. mère

 

-

Qui son coeur veut garder d'ire ne doit pas croire tout ce qu'il entend dire V. ire

 

-

Rien ne peut assuffire le coeur ni la panse du glout ou de l'avare V. assuffire

 

-

Si on blesse le corps du fils, le coeur de la mère le sent V. mère

 

-

Tel chante qui au coeur soupire V. chante

 

-

(Telle et) tel dance(nt) à qui au coeur ne tient V. danser

 

-

Tel crie haut le matin, qui le soir a le coeur triste et dolent V. crier

B. -

[Le coeur comme siège des qualités morales ou de défauts]

 

-

À coeur vaillant rien d'impossible : "Vraiement, dist Laomedon, je ne croy point qu'il soit possyble que le monstre puissiez vaincre. Qui est celui qui s'exposera a sy grant follie ? - A ceur vaillant rien impossible, dist Herculés, se je triumphe sus le monstre, et ta fille saulve, quel loyer en auray je ?" (LEFÈVRE (R.), Hist. Troyes A., c.1464, 296). ...qui s'accorde a paix et a concorde Misericorde obtient de Dieu paisible : A coeur vaillant, il n'est riens impossible. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 76). En nostre marche, ou guerre se desmarche, Prospere et marche Amour douce et paisible : A coeur vaillant il n'est riens impossible. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 355). [Ex. passim]

 

Rem. Hassell 78, C231 ; DI STEF. 181a, coeur.

 

-

Bon vouloir procède du coeur V. vouloir

 

-

Chose celée en coeur n'est pas profitable V. celer

 

-

C'est folle démesurance d'avoir grand coeur en pauvre panse (si l'on n'a pas même de quoi se nourrir) : Tropt est folx qui met s'esperance De passer oultre sa puissance Pour acomplir son grant coraige. C'est tropt fole demesurance D'avoir grant cuer en povre pance. (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340, 97).

 

Rem. Morawski, 2202 : Riche cuer ne vaut rens en pouvre pance.

 

-

Coeur honnête ne peut mentir : Je croi bien que c'est chose voire Qu'il vous fist mal au departir, Car cuer loyal ne peut mentir Ou vraie amour est et habite, Mais fait son devoir et s'acquitte Envers ce qu'il aime touz jours, Soit de joie avoir, ou dolours Pour li porter. (Mir. ste Bauth., c.1376, 113). Les dames par leur grant doulceur A ce faire m'ont meu le cueur. Honneste cueur ne peult mentir. (COQUILL., Oeuvres F., 1478-p.1494, 132).

 

Rem. Morawski 437 : Cuers ne puet mentir; Hassell 78, C233 ; DI STEF. 181b, coeur.

 

-

Coeur libéral partout ses biens espart : Qui luy mesfaict, de bon coeur luy pardonne, Et de ses biens a cascun sa part donne ; Ses proditeurs en ont rechut leur part : Coeur liberal partout ses biens espart. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 187).

 

-

Cruel coeur n'a point d'amitié : Et, pour ce, ne porte rancune Contre aulcun qui devant toy viengne. Aultre raison ne t'en rends qu'une Et a jamais bien t'en souviengne, C'est que pour chose qui adviengne Ne doibs nul juger sans pitié. Cruel cueur n'a point d'amytié. (MESCHIN., Lun. princes M.-G., c.1461-1465, 62).

 

-

Coeur qui est parfait vainc tout : Or me poroientli pluiseur Raisonnablement demander Comment on poroit toute erreur Fuïr et et vertus empetrer. Et j'en responderoie au cler : Par estre liés, jolis et ges, Et avoir grasce de donner, Car tout vaint coers qui est parfés. (FROISS., Ball. B., c.1362-1377, 23).

 

-

De l'abondance du coeur parle la bouche (volontiers). "On s'empêche difficilement de parler des choses dont le coeur est plein" : [P. réf. à Matth. XII, 34] ...de l'abondance du cuer la bouche parle (VIGNAY, Théod. Paléol. K., c.1333-1350, 41). Et pour ce dit aussi un sage assez à cest propos : "Se tu veuls, dit il, savoir quel cuer aucune personne a, considere bien et avise de quel matiere il parle voulentiers et plus souvent", aussi que s'il voulsist dire : tu le saras par ce car de l'habondance du cuer, ce dit il, parle la bouche voulentiers. (EVR. CONTY, Eschez amour. mor. G.-T.R., c.1400, 677). ...de habundance de cuer la bouche parle. Et se puet ycy prendre parler pour toute maniere de chanter (GERS., Canticordum G., c.1425-1430, 127).

 

Rem. Trad. du lat. (Ex) abundantia cordis os loquitur ; cf. TLF I, 145b, s.v. abondance, qui atteste la loc. prov. depuis FUR. 1690. Hassell 57, B151.

 

-

Dieu amollie le coeur orgueilleux V. Dieu

 

-

Dieu seul connaîtt l'intention des coeurs V. Dieu

 

-

En petit coeur loge souvent très grande convoitise V. convoitise

 

-

Es nobles coeurs sont les riches vertus : Glorieux aigle, imperant patriarche, Sceptre romain, espee triumphant, Qui de ta haulte exellente monarche As fait descendre en nostre petite arche Ton sainct puillon et bienheuré enfant, Fort que ung lyon, puissant que ung elephant, Preux que ung Hector, hardis comme ung Artus : Es nobles coeurs sont les riches vertus. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 225).

 

-

Ire trouble le coeur des gens V. ire

 

-

Joie triste coeur travaille V. joie

 

-

Juge doit juger droit, ou il n'a pas le coeur vrai V. juge

 

-

La bouche prononce les paroles, mais Dieu regarde le coeur V. bouche

 

-

La valeur de l'homme gît en son coeur V. valeur

 

-

Le coeur dit souvent le bien ou le mal que la créature a : ...en l'onneur de Mahon l'aumosne demanda [Robastre], La belle de sa bouse ung florin lui getta, Quant Robastre le tint doulcement l'apella : "J'ay", dist il, "grant mestier de vous, n'en mentiary ja, De parler en privé de ce qui touché m'a.." Quant Frigonde l'ouÿ de sa main l'asigna, Car le cuer lui dit bien et segnefia Qu'il veult parler d'Ernault que pucelle ama ; Le cuer dit bien souvent, ouÿ avez pieça, ou le bien Ou le mal que la creature a. (Hern. Beaul. D.B., c.1350-1400, 32).

 

-

Le coeur fait l'oeuvre : Hé ! Diex, que li .III. frère furent bon vavassour ! Jone damoisel furent, mais il ont grant valour ; Et s'avoient grant coer de conquerre l'estour. Et li bons coerz fait l'oevre, non mie le lonc jour. (Baud. Sebourc B., t.1, c.1350, 103). Il n'est si bon glaive que le corage. C'est à entendre que toute force d'armes est riens se grant courage ne la maine. Pour ce fu dit ou proverbe rural : Le cuer fait l'euvre. (CHR. PIZ., Paix W., 1412-1413, 108). Mais on dist bien souvent, c'es verité prouvee, Que bon ouvrier ne puet venir tart a journee, Car li bons cuers fait l'oevre. (Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 175). Or avant, Bordelais, bonne gent redoutee ! Gerart s'y soit saisy et se gent decopee ! Ne faut point que faintise soit en vous demoree, Li bons cuers fait l'ouvrage ! (Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 650). Par son merite aquist la thoison [Le comte Englebert de Nassau], Myeux que Jazon quy fall a Medee ; Grand chambellans fut aulcune saison De la maison d'Austrice et qui par son Hault bruit et son fut moult recommandee, Sy bien gardee et sy bien regardee Qu'entrelardee est de gloire a tousjours : Le cueur faict l'euvre et non pas les longz jours. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 395).

 

Rem. Morawski 1069 : Li cuers fet l'euvre ; Hassell 79, C236 ; DI STEF. 181a, coeur.

 

-

Le coeur noble croit toudis bon conseil V. conseil

 

-

Loin des yeux, loin du coeur V. oeil

 

-

Orgueilleux coeur soi-même se déçoit : Ce Narcisus aprés, considerant Que par dame avoit esté prié, S'en orguillit et tout en se mirant, Aprés qu'il s'en eust en soy glorifié, Par le vouloir des dieux fut tost mué En une fleur qui és fontaines croist. Orgueilleux cueur soy mesme se deçoipt. (COQUILL., Oeuvres F., 1478-p.1494, 115).

 

-

Quant un coeur s'est fourvoyé il n'est de légier ravoyé V. fourvoyer

 

-

Vilain coeur ne plaint pas deuil d'autrui : Rien ne demeure aux environs Que les saquemens tiennent sainc. Villain cueur aultruy dueil ne plaint. (GAGUIN, Passe temps oisiv. T., 1489, 409).

 

-

Vraie espérance tient le coeur en ferme ordonnance V. espérance

 

Rem. Cf. aussi Morawski 511 : De large cuer adés largesse et de dur cuer toujours destresce, 1479 : Len n'aura ja de cuer correcié clere face, 2014 : Qui n'aura cueur si en prenne, 2306 : Tanz cuers, tantez volentez.
 

Lexique de proverbes Pierre Cromer

 Article 2/18 
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     COEUR     
FEW II-2 cor
COEUR, subst. masc.
[AND : coer1 ; DÉCT : cuer2 ]

I. -

"Courage" : Cuer et hardement recouvré Ont (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 102).

II. -

Avoir à coeur. "Avoir à coeur" : ...quelle redoubtée et reverent personne estoit cellui à veoir, qui heure ou temps ne passoit sans l'occupacion d'aucune bonne euvre, c'est assavoir ou vacquier en ce qui touchoit le bien de la chose publique, sur toute riens il avoit à cuer (CHR. PIZ., Paix W., 1412-1413, 70).
 

Pizan Joël Blanchard / Michel Quereuil

 Article 3/18 
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     COEUR     
FEW II-2 cor
COEUR, subst. masc.
[AND : coer1 ; DÉCT : cuer2 ]

I. -

"Organe interne de l'appareil circulatoire" : Si vous me voulés adresser Et me conduire ma lance Droit au cuer ung peu sur la pance, Je le poulsarey si tresbien Que cognoistrés en son maintien S'il a vie ne tant ne quant. (Pass. Auv., 1477, 230).

II. -

Au fig.

A. -

"Siège des sensations, émotions et sentiments"

 

1.

[Les caractères du coeur]

 

-

Coeur parfond : Il te vient bien de cuer parfont Et d'une bonté merveilheuse De pardonner a ceulx qui t'ont Donné poine si angoysseuse ! (Pass. Auv., 1477, 216).

 

-

Doux coeur : Le doulx cuer en m'oyant fructiffie, Et de ses pechés mercy crie. (Pass. Auv., 1477, 137).

 

-

Dur coeur : La semence est la parole Dieu, Que es durs cuers [l. cueurs] n'a point de lieu, Si peu que semence sur piarre. (Pass. Auv., 1477, 137).

 

Rem. Empl. méton. dans ces deux ex. tirés d'une paraphrase de la parabole du semeur (Luc 8, 10-15) : "ceux qui ont le coeur doux", "ceux qui ont le coeur dur".

 

-

Coeur si dur que pierre : Je dy q'un cuer si dur que pierre S'admolliroit veyant cecy. (Pass. Auv., 1477, 155).

 

-

Coeur hautain : Je scey bien qu'elle a le cuer autain Et qu'elle est bien de mal affaire (Pass. Auv., 1477, 134).

 

2.

[Les accidents qui affectent le coeur]

 

a)

Amollir le coeur : ...elle a grant fain De veoir quelque miracle faire A ce prophete de bon aire [Jésus], Que le cuer des gens admollist (Pass. Auv., 1477, 134).

 

b)

Navrer le coeur : Je vaiz ad Jhesus le saulveur ; Ses beaulx ditz m'ont navré le cuer. Je suis du tout de s'amour prise (Pass. Auv., 1477, 151).

 

-

Rompre le coeur : Las, quel ardeur Me romp le cuer - d'y veoir si tresgros partuis ! (Pass. Auv., 1477, 256).

 

-

Serrer le coeur : Pitié tout cuer - sarre et destrainct [l. destraint]. (Pass. Auv., 1477, 241).

 

c)

Resjouir le coeur à qqn : Mon filz (...) me dictes deux ou trois motz Pour moy resjoïr tout le cuer ! (Pass. Auv., 1477, 191).

 

-

Faire le coeur joyeux à qqn : Or laissés ces plaintes mondaines, Ma bonne seur ; pensés es cieulx, Ou Jhesus a joyes aultaines, Et nous farés le cuer joyeux. (Pass. Auv., 1477, 254).

 

3.

[Les émotions et les souffrances éprouvées par le coeur]

 

a)

Le coeur s'amollit : Je dy q'un cuer si dur que pierre S'admolliroit veyant cecy. (Pass. Auv., 1477, 155).

 

b)

Le coeur me crame : Le cuer me crame - d'oyr telz ditz ! (Pass. Auv., 1477, 240).

 

-

Le coeur me rompt : Certes, je ne serey pas celle, Pour ce que le cuer me romproit, Quant je varrois la vierge belle. (Pass. Auv., 1477, 182).

 

-

Le coeur me casse : De tristesse le cuer me casse (Pass. Auv., 1477, 220).

 

-

Le coeur me fend : J'en ay ung remort (si) tresgrant que le cuer me fent ! (Pass. Auv., 1477, 234).

 

-

Mon coeur leve, mon coeur creve : Il fault que lieve Mon cuer, que creve - pour ceste mort. (Pass. Auv., 1477, 240).

 

-

Avoir le coeur vain : De doleur j'ay le cuer tout vain (Pass. Auv., 1477, 197).

 

-

Avoir le coeur triste et serré : Il n'est rien que puisse gouster Ne degouster, Tant ay le cuer triste et sarré. (Pass. Auv., 1477, 277).

 

-

Prendre qqc. en coeur. "Être affecté de qqc." : Si fort prens en cuer ce diffame Que j'en pers du tout le parler. (Pass. Auv., 1477, 208).

 

4.

[Les inclinations et dispositions du coeur]

 

a)

Avoir le coeur enclin à qqn. V. enclin

 

b)

Le coeur est prest à + inf. : Las, mon cuer nect Est ja tout prest - a morir si ce m'est le mieulx ! (Pass. Auv., 1477, 257).

 

5.

[Les élans du coeur]

 

a)

Le coeur s'adresse à qqn : A toy, Simon, mon cuer s'adresse Pour toy parler de ton profit. (Pass. Auv., 1477, 153).

 

-

Donner son coeur à qqn : Desoubz la table, mon saulveur, Ad voz piés gecter je me vaiz. Helas, je vous donne mon cuer ; Pardonnés moy tous mes mesfaiz ! (Pass. Auv., 1477, 152).

 

-

Avoir son coeur en qqn : Treshault Dieu (...) Ou j'ay mon cuer et ma fïance (...) Veulhe moy donner alegrance ! (Pass. Auv., 1477, 278).

 

b)

Loc. adv.

 

-

De coeur : Mes amis, de cuer je vous prie Qu'alliés a luy. (Pass. Auv., 1477, 87).

 

-

De tout mon coeur : De tout mon cuer joyeusement, M'amye, vous obeyrey. (Pass. Auv., 1477, 91).

 

-

De bon coeur : O Dieu, de bon cuer te supply Droit ycy Que soyons avec toy logés. (Pass. Auv., 1477, 103).

 

-

De grand coeur : Goubelet, beau Gobelet, venés a moy de mactin ; De grant cuer vous baisarey, mes que soyes plein de vin (Pass. Auv., 1477, 178).

 

-

De coeur parfond. "Avec ardeur, avec zèle" : Souverain Dieu, de cuer parfond Accomplirons vostre plaisir. (Pass. Auv., 1477, 98).

 

-

De coeur fin. "De tout son coeur" : Va ad Jhesus et de cuer fin Luy dit que le veulhe guarir. (Pass. Auv., 1477, 127).

 

6.

[Terme d'affection]

 

-

En appellatif : Adieu, m'amour et mon cuer fin ! (Pass. Auv., 1477, 224).

B. -

"Siège de la vie intérieure profonde d'une personne" : Il ne fault qu'entrer plus parfont Du cuer Herodes pour tempter. (Pass. Auv., 1477, 93).

C. -

"Siège de la connaissance intuitive" : Mon cueur s'employe A panser qu'il me fault morir. (Pass. Auv., 1477, 110).

D. -

"Courage, ardeur"

 

-

Mettre le coeur à qqc. : Nous y advons bien le cuer mis [à notre office]. (Pass. Auv., 1477, 195).
 

Passion d'Auvergne Jean-Loup Ringenbach

 Article 4/18 
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     COEUR     
FEW II-2 cor
COEUR, subst. masc.
[AND : coer1 ; DÉCT : cuer2 ]

A. -

"Coeur en tant que principe de vie" : Et telle circulacion n'est pas inconveniente, aussi comme l'en diroit que l'en scet que le cuer est chaut parce que le poulz est hastif comme par signe, et ce que le cuer est chaut est cause de ce que le peuls est hastif. (ORESME, C.M., c.1377, 410).

B. -

"Coeur en tant qu'organe central" : Aussi comme le cuer qui est le plus noble membre est aussi comme ou milieu de la beste ou de le honme. (ORESME, C.M., c.1377, 516).

C. -

"Coeur en tant que siège des sentiments" : Et tout ce je di et met sans affermer a grant humilité et cremeur de cuer, salve tousjours la majesté de la foy catholique, et pour reprimer la curiosité ou presompcion d'aucuns qui, par aventure, la voudroient calumpnier ou impugner ou trop avant enquerir a leur confusion (ORESME, C.M., c.1377, 730).

D. -

"Esprit (en tant que siège de la mémoire)" : Et aussi enfans qui ont recordé par cuer aucunes choses, il dient bien les paroles et ne scevent ou entendent qu'il dient. (ORESME, E.A., c.1370, 373).
 

Oresme Charles Brucker

 Article 5/18 
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     COEUR     
FEW II-2 cor
COEUR, subst. masc.
[T-L : cuer2 ; GD : cuer ; GDC : cuer ; AND : coer1 ; DÉCT : cuer2 ; FEW II-2, 1170a : cor]

A. -

"Le coeur, siège des sensations, émotions et sentiments"

 

1.

[La pitié] : Il n'est nul cuer, il fust de marbre, Plus dur a ploier que gros arbre, Se ces mots cy ot regehir Qui plorer ne doive et gemir. (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 155).

 

2.

[La tristesse]

 

-

Casser le coeur. "Briser le coeur" : Filz, vostre mort le cueur me casse (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 222).

 

-

Percer le coeur. V. percer

 

-

Trespercer le coeur. V. trespercer

 

-

Le coeur me pasme : A Dieu ! pere. Le cueur me pasme, Quant icy vous voy mort gisant, Vous qui estiez le plus puissant Qui fust en l'universel monde. (Myst. st Laur. S.W., 1499, 184).

 

-

Le coeur me souspire : Rommain, le soleil est levé, Allons au lever de mon sire. Le cueur au ventre me souspire ; Je ne sçay que je puis avoir. (Myst. st Laur. S.W., 1499, 183).

 

-

Le coeur me creve. V. crever

 

-

Avoir le coeur crevé. V. crever

 

-

Le coeur me faut. V. faillir

 

-

Le coeur me fend. V. fendre

 

-

Le coeur me glace. V. glacer

 

-

Le coeur me ment. V. mentir

 

-

Le coeur me rattendrit. V. rattendrir

 

-

Le coeur me saigne. V. saigner

 

-

Le coeur me serre. V. serrer

 

-

Le coeur me teint. V. teindre

 

3.

[Le repentir]

 

-

De coeur contrit. V. contrit "Avec contrition"

 

-

Le coeur m'amollie. V. amollier

 

4.

[La peur]

 

-

Avoir le coeur noirci : De paour ay le cuer noirci, Helas ! a li parler je n'os (Jour Jug. R., c.1380-1400, 244).

 

5.

[La haine]

 

-

Avoir le coeur endurci encontre qqn. V. endurci

 

6.

[La contrariété] Tirer qqn au coeur. V. tirer "Tourmenter"

 

7.

[La joie]

 

-

Le coeur me fourmie. V. fourmier

 

-

Le coeur me gigue. V. giguer

 

-

Le coeur me haite. V. haitier

 

-

Le coeur me rit. V. rire

 

-

Le coeur tressaut. V. tressaillir

B. -

"Le coeur, siège du désir, de la volonté"

 

-

Loc.

 

.

Avoir son coeur à qqc. "Désirer quelque chose" : Mon seignieur, [or] il vous fault dire A Bernard s'il y az son cuer. (Myst. st Bern. Menth. L., c.1450, 15).

 

.

Avoir qqc. sur le coeur. "Désirer quelque chose" : Dictes moy, sans attandre plus, Ce qu'en avés sur vostre cueur, Car l'emperere mon seigneur Le veult savoir, Et pour ceste cause de voir M'a cy devers vous envoyer. (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 93).

 

.

Esclarcir son coeur à qqn. V. esclarcir

 

.

Mettre son coeur à + inf. "S'appliquer à" : Parle LE VALET a Cayphas. Syre Caÿphas, entendés : Vecy celuy que demandés. Saichés que bien est vostre amys, A vous servir a son cueur mys. (Pass. Autun Biard F., 1470-1471, 131).

 

.

Au vif du coeur. V. vif

 

-

Loc. adv.

 

.

De/du coeur. "Volontiers, avec plaisir" : Le grant Dieu, pas ne demorra Que je ne le mainne de cueur ; Je ne le lairay a nul feur Tant comme il sera en vie. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 192). Honny soit quil l'espargnera ! Reguarde comment du cueur j'ovre, La peaul de son dox se desepvre. Tel ovrier doit on aloer. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 196).

 

.

De coeur. "Sincèrement" : Or parle SEINT PIERRE. Or suis je bien deseperé ! De malle heure suis je né, Quar pour mon grant peché Mon segnieurs ay renyé. Mes non pas de ceur ! (Pass. Autun Roman F., c.1400-1500, 187).

 

.

De coeur fin. V. fin2 "Sincèrement, de tout son coeur"

 

.

De coeur agreable. "Volontiers, de bon coeur" : Quant au regard de vostre emprise, Elle est licite et raisonnable Que vous la devez sans faintise L'acomplir de cueur agreable, Ne vous n'avez riens plus notable. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 99).

 

.

Du bon du coeur. "Du fond du coeur, sincèrement" : Roy souverain, a vous je viens Vous faire service et honneur, Ainsi comme il vous appartient Et a mon souverain seigneur, Dont je suis prest, du bon du cueur, Faire vostre commandement. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 223). Monseigneur, sachez fermement Que de bon du ceur le ferons, Et ne le croyez autrement, Que, s'i vous plaise, y entendrons ; Ne autre desir nous n'avons Fors aquerir louenge et gloire Encontre Anglois faulx et felons, Espoir d'avoir d'eux victoire. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 302).

C. -

"Courage"

 

-

Avoir coeur de lion : Il doit avoir cuer de lyon, Hardi et preux, ou sans raison Nom de chevallier est donné. (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 231).

 

-

Avoir un coeur d'homme : Mon compere, il vous fault avoir Ung cuer d'omme, non pas de femme. (Myst. st Bern. Menth. L., c.1450, 91).

 

-

Prendre (bon) coeur. "Prendre courage" : Je vous prie pour Dieu mercy, Tres doulce dame, cuer prendez Et en santé vo recoillez. (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 197). Je vous pry que prenez bon cueur, Que s'il y a venent, j'é coraige De leur faire telle rigeur Qu'i ne l'aront pas daventaige. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 532). Frere, prenez cueur desormais : Gary serés, je vous prometz, Briefment, ce Jhesus est venu (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 488).

 

-

Cueillir bon coeur. V. cueillir

D. -

"Le coeur, siège de la connaissance" : Frere, il n'est main qui peust escripre, Cuer d'omme ne pourroit pensser, Oreille oïr, langue parler, Les grans aises ou ceulz seront Qui Dieu de bon cuer ameront Sur toutes choses sans faintise. (Mart. st Pierre st Paul R., c.1430-1440, 146).
 

Mystères Jean-Loup Ringenbach

 Article 6/18 
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     COEUR     
FEW II-2 cor
COEUR, subst. masc.
[AND : coer1 ; DÉCT : cuer2 ]

"Coeur"

A. -

[Organe interne] : Car j'ay au cuer si grant dolour, Pour tant qu'approucher voy le jour Que l'ennemi le doit avoir, Qu'il m'est avis, au dire voir, Que le cuer me doie partir (Mir. enf. diable, c.1339, 20).

B. -

[Foyer de la vie intérieure] : Cuer et corps, vouloir et pensée Met du tout en vostre baillie (Mir. enf. diable, c.1339, 4).

 

1.

[Siège des phénomènes affectifs] : Car droit ne veult nul vray amant blasmer, Qui met son cuer et son entendement A bien servir la vierge (Mir. ev. arced., c.1341, 145). ...Et me donnez cuer et desir De vous de miex en miex servir (Mir. femme roy Port., c.1342, 176).

 

-

De coeur/de bon coeur. "Volontiers, de bon gré" : Je ne le feray pas envis, Mais de cuer, car il m'est avis Que gentilz estes et courtois. (Mir. femme roy Port., c.1342, 156). ...si feroie De bon cuer ce qui li plairoit. (Mir. marq. Gaudine, 1350, 153).

 

2.

[Siège de la sensibilité morale] : C'est usages qui endottrine Maint cuer de celer et couvrir Sa penance au monde, et ouvrir Son cuer a Dieu par oroison. (Mir. parr., 1356, 9). Je la feray [ceste paciance] de cuer contrict Pour plus tost en avoir destruit Mes vanitez et mes pechiez (Mir. parr., 1356, 9).

 

3.

[Siège de la pensée intime] : C'est voirs, je vueil a vous parler : Mon cuer ne vous puis plus celer. Je vous ay amé vraiement Plus que nul homme (Mir. st J. Cris., c.1344, 269).

 

4.

[La personne elle-même] : Je n'en puis mais ; cuer courrociez Ne scet a la foiz que doit dire. (Mir. enf. diable, c.1339, 10). ...et si en fait peuture A tout vray cuer qui l'ayme (Mir. ev. arced., c.1341, 145). C'est usages qui endottrine Maint cuer de celer et couvrir Sa penance au monde (Mir. parr., 1356, 9).
 

Miracles Pierre Kunstmann

 Article 7/18 
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     COEUR     
FEW II-2 cor
COEUR, subst. masc.
[AND : coer1 ; DÉCT : cuer2 ; FEW II-2, 1170 : cor]

MÉD.

A. -

"Coeur" : Es fievres, ceulx qui ont grant embrasement environ le ventre et mordicacion ou mouvement tremblant du cuer, tous ces signes sont mauvaiz. (SAINT-GILLE, A.Y., 1362-1365, 78). Quintement note que le cueur a science, victoire et dominacion (GORDON, Prat., c.1450-1500, VI, 7). La substance du cueur est dure ainsi comme lacertouse, qui a en soy deux ventricules, c'est assavoir le dextre et le senestre. (PANIS, Guidon, 1478, tr.I, doct.2, chap.5).

B. -

"Estomac" : Es corps ou il n'a point de fleume, qui ont fastide, mors du cueur, tenebres es yeulx, et amertume en la bouche, toutes ces choses signiffient que cel corps a mestier d'estre purgié par haut. (SAINT-GILLE, A.Y., 1362-1365, 73).
 

Lexique de la langue scientifique Danièle Jacquart / Claude Thomasset

 Article 8/18 
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     COEUR     
FEW II-2 cor
COEUR, subst. masc.
[T-L : cuer ; AND : coer1 ; DÉCT : cuer2 ; FEW II-2, 1170 : cor]

I. -

[En tant qu'organe central] "Coeur" : Mez nous devons savoir que le Philosofe [Aristote], ou Livre dez bestes, si dist que ou cuer est le comancement dez voynes, lezquelles transportent le sanc aux aultres membres, sanz lequel le corps ne pourret vivre (Songe verg. S., t.1, 1378, 61). Pour ce que l'air fort empiré Toudis attrait et inspiré, Avec son venim et malice, Moult pénétrant et plain de vice, S'en va au cuer soudainement, Et au pommon pareillement (LA HAYE, P. peste, 1426, 43). Unes choses especiales Que l'en appelle cordiales, Pour réconforter en partie Le cuer, la fontaine de vie, à quoy valent les margarites Qui sont unes pierres petites (LA HAYE, P. peste, 1426, 118). Muant la forme gracieuse En une autre trop vicieuse, Dont la mauvaise qualité Assault le cuer sans amité, Il fault et est expédient Secourir au cuer patient Par saignier, ou commencement, D'un braz ou deux moult largement (LA HAYE, P. peste, 1426, 119). ...jaçoit ce que le ceur soit la fontaine generative du sanc et des esperis, toutesfois le sanc est le fondement de la chaleur naturelle (Rég. santé corps C., 1480, 162).

A. -

"Partie de la poitrine extérieure sous laquelle se trouve le coeur" : Et qui vouldra ce pratiquier Doit forment mettre et appliquier Icelles liqueurs ou iteles Sur le cuer et sur les mamèles, Et mesmement sur la fenestre Où le cuer tent, ce dit le Maistre, Et les lessier et retenir, S'il veult à bon effect venir. (LA HAYE, P. peste, 1426, 121).

B. -

[Peut désigner le coeur ou l'estomac] "Partie intérieure de la poitrine" : Qui le veult mesler et confire Sagement avec la racine De caparis, une herbe digne, Et, selon l'art de Médicine, Tout homme aiant foible poictrine, Mal estomac ou dolent cuer, Doit mains user de tel liqueur (LA HAYE, P. peste, 1426, 126).

C. -

[Qui fait partie du coeur, qui est lié au coeur]

 

1.

Veine du coeur. V. veine

 

2.

Os du coeur du cerf. V. os

D. -

P. anal. "Partie centrale d'une chose" : Ceulx estoient assaillis et devourez de serpens, de scorpions, de couleuvres et de crapous enflez, envenimez et tous ardans, qui leur gettoient leurs santonines et leurs venins jusques au cueur du ventre. (Horloge de sapience S., c.1389, 103). L'autel est la voulenté de l'omme, qui est comme ou milieu du cuer de ce temple. (GERS., Purif., 1396-1397, 63).

II. -

P. métaph.

A. -

[Siège des sensations et émotions] : ...avance toy, mon chier enfant, qui jadiz estoyes la joye de tout mon cuer, haste toy pour moy secourir, pour moy tirer et delivrer de ce tres doloreux tourment (GERS., Déf., 1400, 227). Et pour cela que sa matière Triacale, plaisant et chière, Ministre au cuer joie et léesce, Notoirement quant il s'adresce. (LA HAYE, P. peste, 1426, 133).

 

-

[P. réf. au sermon sur la montagne, Matth. V, 4] : Et par le contraire Ceulz yci sont bieneureux Qui les cuers ont doloreux. Et fonderay ma predicacion, qui est une plaidoyerie de verité, en trois raisons principales, et dy que cuer doloreux - et j'entens de bonne doleur, de doleur de penitence - amaine trois excellens biens. Cuer doloreux delivre ses amis de dur emprisonnement, delivre soy meismes de rigoreux jugement, recoit yci joyeux asseurement ou sentement. (GERS., Déf., 1400, 223).

B. -

[Siège de l'affectivité, des passions, des vices]

 

1.

[Plus partic. quant à son attitude envers Dieu] : Se tous les pracheurs qui ou monde sont ne cessoyent chascun jour de preschier a l'ame qui est en ce point mise, c'est assavoir en mauvaise acoustumance et en durté de cuer, ilz ne l'amolliroyent pas a bien faire ; point ne feroyent tant qu'elle laissast sa mauvaise coustume, qu'elle levast son cuer a Dieu, que elle issist hors du sepulcre et de l'abhominable ordure de pechié. (GERS., Purif., 1396-1397, 66). Et ay mis en la personne des Vertuz raisons qui bien puent mouvoir nous cuers a croire et tenir que nostre Dame oncques ne fut, en sa concepcion ne aprés, fors toute belle, vive, pure et nette (GERS., Concept., 1401, 408). Ainsy font pluseurs qui ne se daignent repentir de cuer, ainsoys veullent tousjours attendre en leur ordure. (GERS., Trin., 1402, 165). Item Dieu par sa misericorde rechoit joyeusement le pecheur retournant envers lui, et esmolit son cuer a faire penitance, et legierement pardonne l'offence, et aprez le pardon plus ne lui souvient de l'injure a lui faicte. (Somme abr., c.1477-1481, 180). Certes ceste predicion si veritable de la science des estoilles doit toute seulle crever le cueur à ses ebethés calumpniateurs de astrologie, qui dient que ne sont que vanités et mensonges. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 79 r°).

 

Rem. V. aussi crève-coeur

 

-

Défaute de coeur. V. défaute

 

-

Les nets de coeur. "Les purs" : ...et fut appellé filz de Dieu [saint Paul] pour sapience qui est appropriee au Filz, laquelle il parloit entre les parfaiz, et la receu a cause de pais de conscience. Ces deux promesses fait Jhesu Crist ; l'une aux nes de cuer, l'autre aux paisibles. (GERS., P. Paul, a.1394, 513).

 

2.

Coeur orgueilleux : Las ! et de quoy prendras tu orgueil et gloire d'ores en avant, o sot cuer orguilleux de creature humaine ? (GERS., Noël, p.1404, 295). Le flegmatique (...) est moult obliuieux, paresseux et sommilleux, de char mole et fluxible, de couleur fade et blanchastre, le cuer orguilleux et enfle, plain de crachemens et de humeurs habondant (CIB., p.1451, 219).

 

3.

[En partic. quant à sa capacité de compassion] Dureté de coeur ; coeur dur ; obduration du coeur : Mais Obstinacion la met [l'âme] en la biere et ou sarcueil qui se nomme oblivion de Dieu. Et affin que jamais ne soit ostee, cruaulté luy met tres pesant, tres froide et tres horrible pierre de obduracion de cuer et de desesperance. (GERS., Purif., 1396-1397, 66). Dieu vueille par sa grace que sur nous ne viengne telle cruaulté et telle dureté de cuer ! (GERS., Purif., 1396-1397, 66). Qui est l'omme de cuer si dur, si ingrat et si pervers que se le roy, qui icy est, offroit monseigneur le Daulphin, son propre enfant, a mort pour le garentir de mourir, et pour le sauver et honnourer, qui moult n'amast le roy ? (GERS., Noël, p.1404, 294).

 

4.

[Source des qualités de caractère] "Courage" : Cestui Theseus mist son estude de vouloir ressembler à Herculles et fut de très hardi cueur. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 27 r°).

 

-

Prendre coeur. "Prendre courage" : Et te souveigne en prenant cuer du benoist saint Loys, ton grant pere, et des vaillans roys de la nef francoise tes predecesseurs, qui pour tenir bonne justice regnerent vaillamment. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.2, c.1386-1389, 192).

 

-

Reprendre coeur : Si reprint cuer ou doulx buvrage que Charite, Doulce Amour la royne, du dextre coste de l'Aignelet occis avoit presente au jeune Moyse. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.2, c.1386-1389, 513).

 

Rem. Cf. DI STEF., 180b, s.v. coeur.

 

5.

[La vie intérieure, la pensée intime]

 

a)

[Siège de la pensée] : ...haste toy pour moy secourir, pour moy tirer et delivrer de ce tres doloreux tourment plus grief que langue ne pourroit dire, ne cuer penser. (GERS., Déf., 1400, 227). ...ou en oyant la messe ou sermon, ont le cuer tousjours a terre, c'est a dire a pensee terrienne, orde ou charnelle, ont le cuer en la cuisine, comme on seult dire. (GERS., Noël, p.1404, 299).

 

b)

[En cooccurrence avec bouche , où coeur exprime adhésion totale aux paroles dites] : Riche Precieuse, Verite la royne, de bouche et non de cuer nous recognoissons nostre deffaulte, et veoyons nostre ruine, nostre pauvrete et nostre laide figure, nostre infortunite et nostre maleurte. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.1, c.1386-1389, 271). Concluons que ce traitre flateur ne nous gette en excommeniement, affin que nous, en saluant Nostre Dame, soions d'elle resaluez, quant nous disons de cuer ou de bouche : Ave, Maria, gracia... (GERS., Annonc., a.1400, 236). Qui est la bouche qui pourroit dire, ou cuer comprendre la divine leesse que vous receutes au jour d'uy, Mere de Dieu glorieuse ? (GERS., Noël, p.1404, 291).

 

Rem. Cf. DI STEF., 176a-b, s.v. coeur

 

-

Prov. De l'abondance du coeur parle la bouche volontiers : "Se tu veuls, dit il, savoir quel cuer aucune personne a, considere bien et avise de quel matiere il parle voulentiers et plus souvent", aussi que s'il voulsist dire : tu le saras par ce car de l'habondance du cuer (...) parle la bouche voulentiers. (EVR. CONTY, Eschez amour. mor. G.-T.R., c.1400, 677).

 

Rem. V. aussi abondance

 

c)

Avoir le coeur en la cuisine. "Avoir l'esprit occupé par des pensées d'ordre matériel" : Chasse hors, au moins pour I peu de temps, toute autre cure et souci, autre pensee de tes besoingnez mondaines ; ne soit pas le corps au moustier et le cuer en la cuisine. (GERS., Pent., p.1389, 72). ...ou en oyant la messe ou sermon, ont le cuer tousjours a terre, c'est a dire a pensee terrienne, orde ou charnelle, ont le cuer en la cuisine, comme on seult dire. (GERS., Noël, p.1404, 299).

 

Rem. Cf. DI STEF., 178c, s.v. coeur.

 

6.

[Faculté spirituelle de percevoir les mystères de la foi] : Ouvrez doncques les oreilles espirituelles de vostre cuer, tendez les en hault, et escoutez leur humble requeste [des âmes des trépassés] et leur plainte doloreuse, pour les aydier, secourir et delivrer. (GERS., Déf., 1400, 226). Ouvrez les yeulz maintenant de vostre cuer, et par le jour de vraye foy regardez cest enfant au jour d'uy nez : le veez vous ? Y pensez vous ? (GERS., Noël, p.1404, 295).

 

7.

Loc. De (tout) coeur : Je regarde que aucuns sont qui servent Dieu de tout leur cuer en faisant ses commandemens ; et se a la foys ils pechent, tantost sont repentans et en sont yci puniz et purgiez. (GERS., Déf., 1400, 224). ...a toy, vray et certain Pere, sommes venues humblement nous offrir labourer diligemment et de cuer a ceste besoingne, chascune selon son pouoir et office que tu nous as presté (GERS., Concept., 1401, 395).

C. -

ASTR. Estoile du coeur du Lion. "Régulus, dans la constellation du Lion" : Car il en y avoit .XV. [estoiles] qui estoient les plus grandes de toutes les aultres et sont appellees de la premier gra[n]deur, comme est l'estoille du cueur du Lion (FUSORIS, Traité cosmogr. G., 1432, 34).
 

Littérature didactique Hiltrud Gerner

 Article 9/18 
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     COEUR     
FEW II-2 cor
COEUR, subst. masc.
[AND : coer1 ; DÉCT : cuer2 ]

A. -

Au propre. "Organe qui assure la circulation du sang dans le corps" : Et aprés disner, fut coupé la teste d'un Ytallien qui avoit tué ung paige des François et mengé son cueur (LA VIGNE, V.N., p.1495, 263).

B. -

Au fig. [Siège de diverses fonctions]

 

1.

[Siège des facultés intellectuelles] "Esprit" : Brief, quant j'y pense le cueur me va resvant, Car telle chose jamais voir ne pensoye. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 160).

 

2.

[Siège des sentiments] : ...Dont nous portons dedens nostre cueur quelque Griefve douleur (LA VIGNE, V.N., p.1495, 316).

 

3.

[Siège du courage] : Car, lorsqu'on frappoit sur luy, le couraige luy croissoit, et qui plus est, encouraigoit ses gens et leur faisoit enfler le cueur, tant par ses dictz que par ses vertueux faitz. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 288).

 

4.

[Siège de la volonté, intention] : Pour ce entendez maintenant, Gabriel, Et vous aussi, familier Raphael, Ce qui me vient a cueur et a couraige (LA VIGNE, S.M., 1496, 208).

C. -

Loc.

 

-

Avoir à coeur. "Accepter, prendre favorablement" : Parquoy, aprés la mort d'icelluy, il monstra bien qu'il avoit a cueur et aymoit bien et affectueusement ce que luy avoit esté recommandé a la fin du dict notable seigneur de Vendosme. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 312).

 

-

De bon coeur. "Volontiers" : Hellas, monsieur, se je sçavoye Vous faire service ne bien, Tresvoluntiers je le feroye De bon cueur (LA VIGNE, S.M., 1496, 532).

 

-

Par coeur. "Par connaissance mentale, sans avoir recours à un texte écrit pour se souvenir" : Trompete, va legierement Partout publier cest affaire Et dis par cueur ton mandement (LA VIGNE, S.M., 1496, 158).

 

-

Le coeur me part. "Je perds courage, espoir" : J'enraige, brou ! Le cueur me part, Jamais ne feray chiere baulde. (LA VIGNE, S.M., 1496, 288). SAINCT MARTIN. Ains que d'icy faire depart, Dictes moy vostre adversité. CLAUDE. A peu que le cueur ne me part, Tant suis en grant proplexité ! (LA VIGNE, S.M., 1496, 524).

 

-

Prendre à coeur. "Apprécier, aimer" : Plus fut content le roy de ce mistere Que qui luy eust cent mil escuz donné, Et print a cueur tellement la matiere Que tost aprés de volunté entiere Leur petit don fut bien reguerdonné (LA VIGNE, V.N., p.1495, 172).

 

-

Prendre à contre coeur. "Prendre en mauvaise part" : CATHECUMYNAIRE. (...) je suis entalenté D'estre a vous tous treshumble serviteur Ne ne prandray voz ditz a contre cueur Në a nul mal vostre correction Se je failloye au service du cueur Ou a quelque aultre bonne operacion. (LA VIGNE, S.M., 1496, 373).

 

-

Venir à contre coeur. "Déplaire" : Si grant erreur me vient a contre cueur, Que teste et corps me creve de despit ! (LA VIGNE, S.M., 1496, 369).

D. -

[Terme d'affection] : Mon filz, ma plaisance certayne, Mon enffant, ma doulce porture, M'amour, ma joye souverayne (...), Mon cueur, ma belle creature (LA VIGNE, S.M., 1496, 389).

E. -

"Lieu central" : DIEU. (...) J'ay resplendy de ma divinité Le cueur des cieulx (LA VIGNE, S.M., 1496, 208).
 

La Vigne Annie Bertin

 Article 10/18 
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     COEUR     
FEW II-2 cor
COEUR, subst. masc.
[AND : coer1 ; DÉCT : cuer2 ]

I. -

"Organe, situé dans le thorax, qui joue un rôle essentiel dans la circulation du sang" : Et quant il oÿ parler de dame par amours, comme cellui qui onques ne l'avoit pensé, les yeulx larmoiant, le cuer fremist et le viz palist, si qu'il ne sceust un seul mot parler. (LA SALE, J.S., 1456, 7).

II. -

Au fig.

A. -

"Courage" : Alors le pouvre desconfit print cuer et dist : "Oÿ, ma dame, puis qu'il vous plait." (LA SALE, J.S., 1456, 10).

 

-

Prendre coeur. "Retrouver son courage, par un effort de volonté" : Le seigneur, qui ad ce fut certain de la mort de son filz, pour non desconfforter les aultres, ne madame, au mieulx qu'il peult print cuer... (LA SALE, Reconf. De Fresne H., 1457, 21).

B. -

"Volonté, ferme intention" : Qu'en dites vous de cecy ? Avez vous cuer de moy obéir ? (LA SALE, J.S., 1456, 48).

 

-

Avoir le coeur sur le gros. "Être d'un naturel orgueilleux" : Claudius, qui par nature avoit le coeur sur le gros, fust dur a celle paix. (LA SALE, Sale D., 1451, 80).
 

La Sale Pierre Demarolle

 Article 11/18 
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     COEUR     
FEW II-2 cor
COEUR, subst. masc.
[AND : coer1 ; DÉCT : cuer2 ]

A. -

Organe profond et vital, à valeur symbolique : [Supplice de Hugues Spencer] Et li furent copés li vis et les coulles et ruet en .I. feu que on avoit fait devant lui, et puis li ventres ouvers et trais hors son coer et sa coraille, et jetté ens ou feu. (FROISS., Chron. D., p.1400, 186).

Situé dans le ventre : Quant Bernars ot che entendu, si li engroissa li cuers ou ventre, et felenia grandement et dist : "Çà, mes armes ! Ensielés moi mon coursier : il n'en ira ja refussés." (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 121).

S'oppose au corps : [Le roi d'Ecosse, n'ayant pu réaliser son désir d'aller à Jérusalem ordonne qu'on y porte son coeur après sa mort] ...et puisqu'il est ainsi que li corps de mi n'i poet aler ne achiever ce que li coers a tant desiré, jou i voel envoiier le coer ou lieu del corps pour mon veu achiever (FROISS., Chron. L., I, c.1375-1400, 78). Je voel sitos que je sera trespassés que vous prendés le coer de mon corps et le faites bien embasmer (FROISS., Chron. L., I, c.1375-1400, 79).

B. -

Siège des sentiments : ...se li feri une estincelle de fine amour ens el coer (FROISS., Chron. L., II, c.1375-1400, 132). ...a ce point a toutdis mon coer tendu mais nostres sires ne l'a mies volu consentir (FROISS., Chron. L., I, c.1375-1400, 78).

A1 humain a A2, un sentiment, ou coeur. "Eprouve un sentiment" : ...chil qui avoient eu lors freres, lors peres, lors enfans, cousins ou proismes mors avoient grant felonnie ou coer (FROISS., Chron. D., p.1400, 121). Et par especial trop fort desplaisoit au roy d'Engleterre en coer de che que li dus de Bretagne avoit ensi et à petite ocquison perdu son hiretage pour l'amour de lui. (FROISS., Chron. R., VIII, c.1375-1400, 181). "Nuls ne nous venra encore au devant, et tousjours nous croisteront gens qui isteront de Flandres, et qui ont le leur tout perdu, qui voront gaagnier avoecques nous, et qui ont encores ou coer la felonnie et le mautalent sus les François, qui leur ont mors et ochis en ces guerres leurs pères, leurs fils et leurs amis." (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 94).

A1 humain est à/en A2, nom de sentiment, de coeur : Tout en la maniere que il furent jugiet, furent il tantos justichiet par devant le castel de Bristo, veant le roi et veant messire Hue le fil et tous cheuls de la dedens, qui grant despit en orent ; et puet et doit casquns sçavoir que il estoient a grant mescief de coer. (FROISS., Chron. D., p.1400, 86). ...la duçoise de Normendie et la duçoise d'Orliiens et bien troi cens dames et damoiselles et li dus d'Orliiens ossi estoient à Miaus en Brie, en grant meschief de cuer, pour celle jakerie. (FROISS., Chron. L., V, c.1375-1400, 103). Encores estoient à ce jour hostagier en Engleterre, pour le fait dou roy de France, li contes daufins d'Auvergne (...) et pluiseur aultre, qui furent en grant soussi de coer, quant il oïrent ces nouvelles, car mies ne savoient que li rois d'Engleterre et ses consaulz vorroient faire d'yaus. (FROISS., Chron. L., VII, c.1375-1400, 110). C'est l'intencion de moy que je ne me ne vueil pas endormir en ce blasme, ne que on die que, par lasqueté ou par faintise de cuer, je sueffre sus ma sauvegarde robeours, ne à faire nulles pilleries ne roberies. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 162). Ce que nous faisons, c'est en istance de bien, et pour sauver le demorant de la ville. Trop mieuls vault que nous morons, puisque il fault qu'il soit ensi, que toutes les bonnes gens de la ville soient peri, et Dieus avera merchi de nos ames. Ensi en plours et en cris et en grans angousses de cuers dolereus les amena mesires Jehans de Viane jusques a la porte et le fist ouvrir. (FROISS., Chron. D., p.1400, 845).

Le A2, sentiment, de coeur de A1 humain : ...se vous estiiés de vostre peuple reprociés que, par defaute de corage et par paour, vous averiés laissiet aler le vostre, et vous seriés endurchis en ce pechiet, il le vous tourneroient en grant prejudisce et lasqueté de coer et diroient que vous ne seriés pas dignes de porter couronne (FROISS., Chron. D., p.1400, 230).

A1 humain est + part. passé dénotant un état + en/de coeur : ...li rois et messires Hues li Espensiers, qui se veoient assegiet a tel angousse et tel mescief et ne savoient nul confort qui leur peuist venir de nul costé, tant estoient destourbé et destraint de coer que il ne savoient que faire (FROISS., Chron. D., p.1400, 87). Li dus de Bretagne, messires Jehans de Montfort, estoit durement coureciés en coer des contraires que li François faisoient as Englès. (FROISS., Chron. R., VIII, c.1375-1400, 104). Quant Jehans Lions se veï appelés de chiaulx dont il desiroit à avoir le grace et l'amour, si fu en coer grandement resjoïs. (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 167).

A1 a contre coeur A2 humain. "Il le hait" : Bien sentoit messires Charles d'Espagne que li rois de Navare l'avoit grandement contre coer, et s'en tenoit en bien dur parti. (FROISS., Chron. L., IV, c.1375-1400, 129). De quoi tout cil dou pays, grans et petis, nobles et non nobles, en furent durement tourblet et couroucié, et eurent puissedi durement contre coer le signeur de Mortemer. (FROISS., Chron. L., I, c.1375-1400, 88).

A1 prend à/en coeur A2, évènement. "Se passionne à son sujet" : Bien le savoit li princes, et en venoient à lui les plaintes tous les jours ; mais il ne voloit mies deffaire ne brisier son siège, car il avoit pris trop à cuer l'avenue de Limoges. (FROISS., Chron. L., VII, c.1375-1400, 248). Li jones contes de Haynau, qui estoit hardis et entreprendans, avoit si pris en coer ceste guerre (...) que c'estoit cilz par qui toutes se mettoient sus les envaies et les chevaucies. (FROISS., Chron. L., II, c.1375-1400, 46).

Met arrière de son coeur A2 (une offense). "Ne veut plus y penser" : Messires Robers d'Artois (...) ne pooit oubliier ne mettre arriere de son coer les despis et les vituperes que li rois Phelippes li faisoit et avoit fais (FROISS., Chron. D., p.1400, 228).

A2 (des paroles) entre ou coeur de A1 humain : Ces paroles entrerent tellement ou coer le roi d'Engleterre qui estoit jones, que onques depuis elles ne li porent issir, et fist prendre son oncle et mener en la Tour a Londres (FROISS., Chron. D., p.1400, 183).

A2, une personne, échoit en coeur à A1 humain. "Lui plaît" : "Amenés vostre niepce en pelerinage à Saint Jehan d'Amiens, et li rois sera contre li. Se il le voit, espoir le golousera il, car il voit volentiers toutes belles coses et les aime ; et, se elle li eschiet en coer, elle sera roïne de France." (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 225).

A1 humain fait A2 action de bon coer/en coeur, de coeur courroucé : [Jean de Hainaut promet son aide à la reine Isabelle] A ceste parole, plora moult tendrement la dame de joie et de pité, et l'en remerchia de bon coer. (FROISS., Chron. D., p.1400, 61). Et puis s'en retourna à Toulouse, quant il eut pris le saisine et possession de le ville et dou chastiel de Montsach, que moult recommenda en coer, et le fist de puis remparer et rapareillier, et dist que de Montsach il feroit sa cambre et son gardecorps. (FROISS., Chron. R., VIII, c.1375-1400, 179). Adont dist li rois d'Engleterre de coer couroucié, quant il se mit au retour : "...Il n'i eut onques mès en France si mescheant roy comme cilz à present est, et se n'i eut onques roy qui tant me donnast à faire comme il fait." (FROISS., Chron. R., VIII, c.1375-1400, 95).

C. -

Le coeur, siège des intuitions

Le coer de A1 humain se trait/s'accorde à A2 abstr. : ...[Philippe de Hainaut désire le mariage qu'on lui prépare] elle en respondi adont sagement et dist que son coer s'i traioit trop grandement, et pensoit bien que elle seroit encores sa fenme. (FROISS., Chron. D., p.1400, 70). Et ot pluiseurs imaginacions à savoir se il demorroit à Gand avoecques les autres. Bien le pooit faire, se il voloit, car tout estoit pardonné (...) Mais, quant il avoit bien examiné son coraige, son coer ne s'i acordoit nullement que il i demorast. (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 310).

Le coeur me dit que... "J'ai l'intuition que" : "Li coers me dist que nous arons en celle nuit Audenarde." (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 137). "Li cuers me dist que la cose n'est pas encore où elle sera ; à che que je puis perchevoir, elle se taille bien que mout de maux en naissent encores." (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 217).

Une pensée vient en coeur à A1 : "...Certes, onques tel pensée ne me vint en coer ne jà ne venra, se Dieu plaist, pour homme qui soit nés..." (FROISS., Chron. L., II, c.1375-1400, 134).

Les coeurs sont de diverses opinions : ...la lettre de deffiance (...) estoit felle et impetueuse, et faisoit moult à ceulx qui en ooient dire les nouvelles à esmerveillier. Si en parloit-on en ces jours en pluseurs manieres, les ungs en une maniere et les aultres en une aultre, ainsi que les cuers sont de diverses opinions. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 180).

A1 sait par coeur A2 : ...les chemins qu'il fait, je les sçay tous par cuer, car aussi en sa compaignie et sans lui je les ay fais trop de fois (FROISS., Chron. M., XII, c.1375-1400, 112).

D. -

Le coeur, siège de la liberté intérieure : "Mais, seigneur, nous vous disons bien que, au faire le serement, toudis en coer nous avons reservé nos fois devers no naturel seigneur le roi d'Engleterre ; ne pour cose que nous avons dit ne fait, nous ne demorrons ja François." (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 15). Il arrivèrent au kay en le Rocelle. Se li fisent li bourgois de le Rocelle grant feste arrière coer, mais il n'en osoient aultre cose faire. (FROISS., Chron. L., VII, c.1375-1400, 140).

A le coeur/est en coeur + adj. ethnique. "Il est du parti du peuple en question" : Et furent pris à Bruges à la venue dou conte tout cil principaulment qui avoient les cuers gantois et qui en estoient souppechonné de l'avoir. (FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 51). Les trois pars des gens de la ville estoient en coer plus Englès assés que François. (FROISS., Chron. L., IV, c.1375-1400, 39). ...le joenne duc de Guerles (...) ot tousjours le cuer plus anglois que franchois, et bien le monstra tant comme il vesquy. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 156). ...le duc de Jullers et messire Edouart de Guerles qui s'escripsoient freres (...) avoient les cuers trop grandement anglois, car ilz s'estoient de long temps aliez aveuc le roy d'Angleterre (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 160). On luy fist très bonne chiere, car on le desiroit à veoir et la cognoissance et aquointance à avoir ; car bien savoient les Anglois et tous enfourmez en estoient que ce duc, leur cousin, estoit de cuer et de couraige, de ymagination et de affection tout Anglois. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 176).

Le coeur de A1 se meut. "Change" : Et disent bien li plus notable de le ville de le Rocelle : "Nous aourrons les Englès des lèvres, mais li coers ne s'en mouvera ja." (FROISS., Chron. L., VI, c.1375-1400, 59).

E. -

Le coeur désignant toute la personne psychique : Che fu uns gentilz coers et vaillans chevaliers, larges et courtois : Diex li face bonne merchi ! (FROISS., Chron. R., VIII, c.1375-1400, 171). ...si avoit (...) le conte d'Asquesuffort tout le cuer du roy d'Engleterre (FROISS., Chron. M., XII, c.1375-1400, 6).

A2 humain connait le coeur de A1 humain : ...velà messire Nicolas Branbre qui a esté maire de Londres ung grant temps et que vous fesistes chevalier pour le bel service qu'il vous fist un jour qui fut, qui congnoist et doit congnoistre par raison assez les cuers des Londriens, car il en est de nation, et ne puelt estre qu'il n'y ait encoires de bons amis. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 59).

F. -

Le coeur désignant l'objet de la passion d'une personne : Au voir dire dou signeur d'Enghien, c'estoit tous li coers dou conte de Flandres, et ne l'appelloit mies li contes de Flandres son cousin, mais son biau fil. (FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 79). "Et le conte de Foeis n'en ot-il onques nulz enfans ?" - "Si eut, dist-il, ung biau filz et qui estoit tout le cuer du pere et du païs." (FROISS., Chron. M., XII, c.1375-1400, 63). ...li contes d'Asquesuffort (...) estoit (...) tous li coers et li consaulx dou roi, ne li rois d'Engletière n'amoit nul homme ne n'avoit parfaitement fiance fors en lui (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 272).

G. -

Le coeur de A1 non animé. Le centre, la partie la plus importante : On se porroit esmerveillier en pays loingtain et estrange du noble royaulme de France, comment il est situé et abitué de citez, de villes et de chastiaulx si très grant foison que sans nombre, car otant bien en es loingtaines marches en y a grant plenté et de fors comme il y a ens ou droit cuer de France. (FROISS., Chron. M., XII, c.1375-1400, 203). Si vous di que sus les camps li signeur pour ce tamps i eurent mout de paine, car il estoit au cuer d'ivier à l'entrée de decembre, et plouvoit toudis. (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 38).
 

Froissart Jacqueline Picoche

 Article 12/18 
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     COEUR     
FEW II-2 cor
COEUR, subst. masc.
[AND : coer1 ; DÉCT : cuer2 ]

A. -

"Le principe vital de l'homme" : ...baille au bon seigneur a demain l'heure de besoigner, dont il est tant content que son cueur tressault tout de joye (C.N.N., c.1456-1467, 74). ...en lysant, le sang luy monte et le cueur luy fremist, et devint tout alteré de maniere et de coleur. (C.N.N., c.1456-1467, 180). Mais la damoiselle, qui plus ne povoit si le cueur ne luy sailloit du ventre, ne peut oncques dire ung seul mot (C.N.N., c.1456-1467, 213). ...son treshoneste, tresvertueux et loyal cueur s'evanuyt, et cheut paulmée. Elle fut prinse et portée sur ung lit, et luy revint le cueur (C.N.N., c.1456-1467, 425).

B. -

"Le siège de l'affectivité" : Madame l'abbesse, oyant ce que dit est, et portant au cueur ung grand fardeau d'ennuy (...) s'accorda, combien que ce fut a grand regret (C.N.N., c.1456-1467, 144). ...en allerent chacun en leur chambre plaindre ses doleurs, Dieu scet ! plorant des yeux, du cueur et de la teste. (C.N.N., c.1456-1467, 168).

 

Rem. En principe, le coeur peut abriter n'importe quel sentiment ; d'où le recours fréquent à une formule coeur + épithète, dans laquelle c'est l'épithète qui indique la nature du sentiment ressenti : ...petit a petit son troublé cueur se remist a nature, et pardonna (C.N.N., c.1456-1467, 30). ...[la chambrière] avec tout le desplaisir et crainte que son ennuyeux cueur charge et empire, se hourde de l'escuier et a son col le charge. (C.N.N., c.1456-1467, 124). ...pour la distance du lieu ne povoit estre si souvent emprès sa dame que son loyal cueur et trop amoureux desiroit (C.N.N., c.1456-1467, 474).

 

-

En partic.

 

.

[Siège de la colère] : ...quand la langue d'elle eut povoir sur le cueur tresfort chargé d'ire et de courroux... (C.N.N., c.1456-1467, 28). ...je vous requier et prie, ostez de vostre cueur tout courroux que avez vers moy conceu, et me pardonnez (C.N.N., c.1456-1467, 29).

 

.

[Siège de la frayeur] : La dame, qui avoit l'oeil et l'oreille tousjours a son amy, l'entreoyt d'adventure, dont elle eut grand frayeur au cueur (C.N.N., c.1456-1467, 436).

 

-

[Le plus souvent siège de l'amour] : ...ung mois après le partement de son amy, desir luy eschaufa le cueur et si luy vint ramantevoir les plaisans passetemps qu'elle souloit avoir (C.N.N., c.1456-1467, 146). ...s'entr'amerent tant fort et si loyalement qu'ilz n'avoient qu'un seul cueur et ung mesme vouloir. (C.N.N., c.1456-1467, 163). ...vous prie que vous n'obliez pas celle qui vous a fait le don de son cueur (C.N.N., c.1456-1467, 167). ...elle qui aultre part avoit le cueur ne fist que ung sault jusques a la chambre de celuy qui l'attendoit de pié coy. (C.N.N., c.1456-1467, 250).

 

Rem. On relève la survivance de la phraséologie courtoise : ...les yeulx d'elle, archiers du cueur descocherent tant de fleches en la personne dudit bourgois que... (C.N.N., c.1456-1467, 23). ...larmes en grand abundance saillirent de ses yeulx, qui furent accompaignées d'aultres sans nombre, sourdans de la fontaine du cueur de son bon couvent. (C.N.N., c.1456-1467, 141). ...tant empescherent sa doulce langue les larmes [sourdantes] du profond de son cueur (C.N.N., c.1456-1467, 145). ...si ne les povoit il forclorre de l'entiere et loyale amour dont leurs deux cueurs estoient mutuellement entreliez et embrasez. (C.N.N., c.1456-1467, 546).

 

-

Loc.

 

.

Toucher au coeur : ...vous savez que je ne puis ma mort fuyr n'esloignier sans faire et commettre peché mortel ! Et que bien autant au cueur me touche, s'en ce faisant ma vie esloignoie, ne viveroys je pas deshonorée... (C.N.N., c.1456-1467, 143).

 

.

Toucher près du coeur : ...pensez comme je vous ay dit aux afferes de nostre eglise, qui me touchent près du cueur, Dieu le scet (C.N.N., c.1456-1467, 142).

 

.

Le coeur tire vers : ...en son langage luy donna assez a cognoistre que le cueur luy tiroit fort devers Brabant. (C.N.N., c.1456-1467, 175).

C. -

"Le siège des qualités morales"

 

1.

[Le courage]

 

-

Avoir coeur de + inf. : ...la pouvre gentil femme n'eut plus cueur, puissance ne vouloir de soustenir son fardeau desplaisant. (C.N.N., c.1456-1467, 125).

 

.

Avoir coeur pour + inf. : Laquelle chose elle ne pourroit souffrir, et n'a pas cueur pour soustenir et porter le desplaisir et ennuy qu'endurer luy conviendroit a ceste occasion. (C.N.N., c.1456-1467, 294).

 

-

Prendre coeur : Vous serez tantost en bon point, si Dieu plaist, madame, dist la religieuse messagiere ; faictes bonne chere et prenez cueur (C.N.N., c.1456-1467, 140).

 

.

Prendre coeur de + inf. : ...le bon chevalier (...) de prinsault fut assez esbahi d'avoir telle rencontre. Neantmains toutesfoiz print cueur et hardement et vouloir de soy defendre s'il estoit assailly. (C.N.N., c.1456-1467, 428).

 

2.

[La lâcheté]

 

-

[Empl. seul] : ...luy remonstrant sa tresfole entreprinse, la grand lascheté de son cueur (C.N.N., c.1456-1467, 73). ...avez monstré la grand lascheté de vostre cueur, qui vous estes habandonnée a ung meschant villain charreton. (C.N.N., c.1456-1467, 345).

 

Rem. Dans ces ex. le mot coeur équivaut à la personne : la lâcheté de son coeur = sa lâcheté, cf. infra E.

 

-

[Empl. avec d'autres subst. de sens voisin] : ...il parla bien a elle, en luy remonstrant sa tres grand lascheté et desloyauté de cueur (C.N.N., c.1456-1467, 239). ...il la veult trop bien tancer et luy dire la lascheté et neanté de son cueur (C.N.N., c.1456-1467, 345).

 

Rem. Il est parfois malaisé de faire une distinction nette entre la notion d'envie, de désir (sens B) et celle de courage (sens C) : ...je n'aroye cueur ne courage de vous faire bonne chere avec ces paillards houseaulx. (C.N.N., c.1456-1467, 157).

D. -

"Le siège de la réflexion, de l'intelligence, de la pensée" : Ces femmes (...) se doubterent de tromperie, dont l'un des mariz d'elles tantost se donna garde, et luy jugea le cueur la verité du fait. (C.N.N., c.1456-1467, 205).

 

-

Avoir sur le coeur

 

.

"Avoir en tête" : ...ne luy cela gueres ce qu'il avoit sur le cueur et, sans aller de deux en trois, luy demanda... (C.N.N., c.1456-1467, 120).

 

.

"Avoir en l'esprit" : Vous savez bien la grand amytié qui est despieça entre luy et moy, et qu'il n'y a celuy qui ne dye a son compaignon tout ce qu'il a sur le cueur (C.N.N., c.1456-1467, 210).

 

-

Avoir au coeur. "Se soucier de" : ...n'avoit aultre regret que monseigneur [son mari] n'avoit l'assault plus au cueur (C.N.N., c.1456-1467, 278).

 

-

(Mon) coeur est à cela que. "(Je) pense que" : ...mon cueur est a cela que ce [faire l'amour] me pourroit estre medicine et cause de garison. (C.N.N., c.1456-1467, 348).

 

-

Savoir par coeur. "Savoir parfaitement" : ...cent mille choses que ces abateurs de femmes scevent tout courant et par cueur (C.N.N., c.1456-1467, 146).

E. -

P. méton. [Équivalent de la personne elle-même] : ...faisans feste, comme font les cueurs gaiz quand ilz se trouvent es plaisans lieu. ["les coeurs gais" étant, ici, l'équivalent de "les gens gais"]. (C.N.N., c.1456-1467, 89). ...mon coeur ne fut oncques d'accord de faire ce que mes parens et amys m'ont a force contraincte de faire. [Seul cas, dans le recueil, d'une graphie "coeur"] (C.N.N., c.1456-1467, 424).

 

1.

[P. oppos. au corps] : ...pour bien choisir et son temps employer, donna cueur, corps et biens a une belle damoiselle (C.N.N., c.1456-1467, 252).

 

2.

[P. réf. à l'apparence (le semblant)] : ...oyant bonne cette adventure, ne fist pas semblant par dehors tel que dedans son cueur portoit (C.N.N., c.1456-1467, 42). ...luy demanda qu'il avoit et que sa maniere monstroit que son cueur n'estoit pas a son aise. (C.N.N., c.1456-1467, 231). ...s'efforçoit de monstrer semblant plus desplaisant que le cueur ne luy donnoit (C.N.N., c.1456-1467, 236).

 

3.

Loc.

 

-

Avoir fort au coeur. "Tenir beaucoup à" : ...il n'estoit pas trop content ne joyeux. Neantmoins, car il avoit la chose fort au cueur, ne laissa pas sa poursuite (C.N.N., c.1456-1467, 48). La bonne dame, qui bien avoit la chose au cueur, appella ceste damoiselle et luy dist... (C.N.N., c.1456-1467, 248).

 

-

De bon coeur. "De plein gré, spontanément" : ...elle fut haultement merciée, doulcement escoutée, et de bon cueur obeye (C.N.N., c.1456-1467, 49). "...N'est ce pas ainsi, mes seurs ? dit elle. - Oy, oy", dirent elles trestoutes de bon cueur. (C.N.N., c.1456-1467, 144). ...fut force a nostre gentilhomme d'(...)aller au service de mon dit seigneur, ce que de bon cueur et bien il fist. (C.N.N., c.1456-1467, 145).

 

-

En son coeur. "Au fond de soi-même" : ...doulcement et en grand reverence luy dist qu'il avoit en son cueur ung secret (C.N.N., c.1456-1467, 93). ...promis luy avoie en mon cueur, non pas de jamais moy marier, mais de le non faire encore (C.N.N., c.1456-1467, 170).

 

-

De tout (mon) coeur. "Pleinement, sans réserve" : ...vous ose bien faire la pareille promesse, vous suppliant treshumblement et de tout mon cueur que mon bon et loyal vouloir me soit reputé... (C.N.N., c.1456-1467, 168).

 

-

Du tout (son) coeur. "Pleinement, sans réserve" : ...en service et aultres choses, il est celuy qui s'i veult du tout son cueur employer. (C.N.N., c.1456-1467, 96).

 

-

Pour la paix de (mon) coeur. "Pour que (je) sois rassuré(e), sans inquiétude" : Si vous prie et requier, pour la paix de mon cueur et plus grande seureté de nostre besoigne, que vous me laissez aller veoir (C.N.N., c.1456-1467, 118).

 

-

De grand coeur

 

.

"De bon coeur" : ...ces femmes entrerent dedans, qui si tresfort rioyent, et de si grand cueur, qu'elles ne sceurent mot dire (C.N.N., c.1456-1467, 188).

 

.

"Avec chaleur" : ...il se trouva seul avecques la gouge, qui le receut tres doulcement et de grand cueur, comme il sembloit (C.N.N., c.1456-1467, 231).
 

Cent Nouvelles Nouvelles Roger Dubuis

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     COEUR     
FEW II-2 cor
COEUR, subst. masc.
[T-L : cuer2 ; GD : cuer ; GDC : cuer ; AND : coer1 ; DÉCT : cuer2 ; FEW II-2, 1173a : cor ; TLF V, 981b : coeur]

"Siège des sentiments, des dispositions intimes" : Lequel qui parle, meu de l'amour que son cuer avoit desjà mise en icelle Marguerite, promist et enconvenança lors à icelle Marguerite (...) que il seroit son mary et la espouseroit (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 205).

 

-

Du coeur. "Avec sincérité, volontiers" : Très-chier et grant ami, se vous voulez chose que je puisse faire, je le feray très-voulentiers et du cuer. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 524).

 

-

Par coeur. "De mémoire" : ...[elle] pria tant et requist icellui Guïot qu'il aprint à elle qui parle, par cuer, l'euvangile mons. saint Jehan ; et laquelle, à ceste fin, elle a assez bien et compettement recitée de bouche. (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 327). ...icellui prisonnier recita de bouche et par cuer les larrecins cy-dessus escriptes par lui autrefois faites (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 420).
 

Registre criminel du Châtelet Bernadette Suty / Monique Haas

 Article 14/18 
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     COEUR     
FEW II-2 cor
COEUR, subst. masc.
[T-L : cuer ; AND : coer1 ; DÉCT : cuer2]

[Le coeur en tant que siège des dispositions intérieures, des sentiments]

 

-

En adoption de coeur. V. adoption

 

-

Avoir grand coeur à qqc. "Éprouver beaucoup d'ardeur, d'entrain pour qqc. ; mettre beaucoup d'espoir dans qqc." : ...ledit nostre Saint Pere, aiant grant ceur a la journee que avoit establie a Mantue, tousjours sollicitoit d'icelle et affectoit fort que fruit en peust venir a la crestienté par l'assistence que les princes lui donroient. (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 233).

 

-

Avoir qqc. à coeur. "Avoir de l'intérêt pour qqc. ; se préoccuper de qqc." : ...bien par l'espace de deux mois aprés le trespas dudit maistre Jehan Chevrot le roy fit semblant de dormir et de non avoir a cuer ceste besongne (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 265).

 

-

Avoir qqc. en coeur. "Avoir qqc. sur le coeur" : Comment le roy ariere leur declara ce qu'avoit encore en ceur (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 26).

 

-

Avoir le coeur sous l'aile. "Être amoureux" (Éd.) : Meriadec (...) luy dist : "Messire Henry, comment l'entendez vous ? Il samble à vous veoir que vous ayez le ceur soubz l'ele et que vous en volez a qui que ce soit. Toutevoyez Monsieur vous a il donné congié de porter emprinse ?..." (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 133).
 

Chastellain Martine Moulin

 Article 15/18 
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     COEUR     
FEW II-2 cor
COEUR, subst. masc.
[T-L : cuer ; GD : cuer ; GDC : cuer ; AND : coer1 ; DÉCT : cuer2 ; FEW II-2, 1170a, 1172a : cor ; TLF V, 981b : coeur]

A. -

"Région épigastrique"

 

-

Avoir mal au coeur : Et environ jour couchant, ledit Jehan se commença à plaindre, disant qu'il avoit mal au cueur et qu'il se vouloit aller coucher, ce qu'il fist, sans boire ne menger ; et environ l'eure de mynuyt il ala de vie à trespassement. (Doc. Poitou G., t.9, 1454, 374).

B. -

P. anal. "Partie centrale, milieu"

 

1.

[À propos d'un arbre] : À lui, pour avoir livré de bois de cuer de chesne emploié en deux casses (Comptes Etat bourg. M.F., t.3, 1418-1420, 587).

 

2.

Au fig. [À propos de choses situées dans un espace de temps] : À Massot d'Avrilli, impositour fermier du plat païz et des villages de la chastellerie de Paci, pour un an (...) pour et en recompensation de ce que sa ferme li avoit esté ostée et le XIIIe mis sus le premier jour daoust CCCLXI en son prejudice, car il avoit poié par mois toute la morte saison, et quant le bon temps vint quil devoit gaengnier et recouvrer ce quil avoit perdu devant, cest assavoir aoust, septembre et octobre, quil fu cuer de vendenges et vente de vins nouveaulx, son marché li fu osté (Compte Navarre I.P., 1367-1371, 400).

C. -

P. métaph.

 

1.

"Siège du désir"

 

-

Loc. Avoir à coeur qqc. "S'appliquer à qqc. avec ardeur" : ...aiens mout à cuer et vueillans pourveoir diligenment que aus religieus et aus eglises de nostre royaume, à leur famille et à leurs biens soit pourveu de seurté de sauve protection. (Doc. Poitou G., t.1, 1333, 431). ...nous voulons savoir quelle diligence en sera par vous faitte, attendu la matière qui est grande, laquelle nous avons bien à cuer et voulons que par justice elle preigne fin ; telement que ce soit exemple à autres qui voudroient faire esmeutes ou rumeur en nostre ditte ville. (Hist. Lille T., t.1, 1385, 55). ...ledit Cuer avoit le fait dudit doienné fort à cuer. (Aff. Jacques Coeur M., 1453-1457, 461).

 

2.

"Siège de la vie intérieure"

 

-

Estre en coeur + attribut. "Être sincèrement" + attribut : Si nous a humblement supplié, comme elle soit née de nostre royaume et ait tousdiz esté et soit bonne françoise en cuer, comme dit est, et fust mariée au dit Henry par sa simplece, et ne doit avoir forfait ne perdre la moitié des dis conquests (Doc. Poitou G., t.4, 1373, 285).
 

Chartes et Coutumes Edmonde Papin

 Article 16/18 
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     COEUR     
FEW II-2 cor
COEUR, subst. masc.
[AND : coer1 ; DÉCT : cuer2 ]

I. -

"La poitrine, qui renferme le coeur" : Aucuns d'eulx furent navrez ou cuer de saiectes qui sont en peril, les autres ou chief, autres es bras, autres es gembes, autres es mains (BAYE, I, 1400-1410, 103).

II. -

"La partie centrale de qqc., centre, milieu"

 

-

Le fin coeur de l'hiver. "Le milieu de l'hiver, le plus fort de l'hiver" : ...et si estoit le fin cueur de l'yver, et touzjours plevoyt et faisoit tres froit. (Journal bourgeois Paris T., 1419, 132).

III. -

P. métaph. "Le siège des sentiments"

 

-

Avoir qqn contre coeur. "Avoir du dépit contre qqn" : ...et eurent en aprez moult contre cuer ledit sire de Mortemer (LE BEL, Chron. V.D., t.1, 1352-1356, 102).

 

-

De bon coeur. "Volontiers" : Auquel la Court, après les regraciations et congratulacions en telz cas acoustumées, a dit et respondu qu'elle, de son povoir très volentiers et de bon cuer, se emploiera à ce que dit est (FAUQ., III, 1431-1435, 48).
 

Baye-Fauquembergue Denis Lalande

 Article 17/18 
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     COEUR     
FEW II-2 cor
COEUR, subst. masc.
[T-L : cuer2 ; GD : cuer ; GDC : cuer ; AND : coer1 ; DÉCT : cuer2 ; FEW II-2, 1170a : cor]

A. -

"Organe central, siège de la vie" : Et Anthoine boute l'espee ou fourreau et l'ahert par le millieu du corps et le tire jus du cheval et le gecte si rudement a terre que a pou que il ne lui a crevé le cuer ou ventre. (ARRAS, c.1392-1393, 162). ...leur pere estoit mort le tiers jour aprez. Et trouverent que le prieur en avoit bien fait son devoir, car il l'avoit fait ouvrir et enbasmer, et appareillier le cuer, et avoient ensevely les entrailles en la chappelle aux lampes, devant le maistre autel. (ARRAS, c.1392-1393, 289).

B. -

"Centre de la vie intérieure"

 

1.

[Siège des émotions, de l'affectivité] : Et gardez, tant que vous aurez a estre conquerant, que entre vous compaignons ne vous maintenez comme sire, mais commun au grant et au petit, et parler et tenir compaignie a chascun selon sa qualité, car ce fait les cuers enflammez d'amour a ceulx qui ainsi sont humain en seignourie. (ARRAS, c.1392-1393, 87). Lors ot ly roys moult grant joye ; mais sachiez qu'il monstroit meilleur semblant que le cuer ne lui apportoit, car il souffroit grant hachie, car le venin qui estoit en la plaie lui bruissoit tout le corps. (ARRAS, c.1392-1393, 121).

 

-

Estre joyeux ou coeur de qqc. "Se réjouir de" : Et ceulx leur en dirent la verité, et estoient moult joyeux ou cuer de l'appareil du noble secours qu'ilz veoient si prestement appareillier (ARRAS, c.1392-1393, 151).

 

-

Estre courroucé en coeur. "Être irrité dans son for intérieur" : L'ystoire nous dist que Remondin fu moult courrouciez en cuer quant il ouy la requeste que ly conte de Poittiers, ses sires, et le conte de Forests, ses freres, lui fesoient, car il amoit et doubtoit tant sa dame que il heoit toutes choses que il pensoit qui lui deussent desplaire. (ARRAS, c.1392-1393, 43).

 

-

Estre dolent à son coeur de qqc. "S'attrister de" : Moult fu la pucelle doulente a son cuer du grant meschief qu'elle voit qui par lui advient en la grosse bataille. (ARRAS, c.1392-1393, 162).

 

-

Mettre griefté au coeur à qqn . "Affliger qqn" : Je vous commande a tous que vous laissiez a mener ce dueil, si chier que vous avez que je demeure en vie encores une piece de temps avec vous autres, car vostre doulour me met au cuer plus de griefté que l'angoisse de la bleceure que j'ay. (ARRAS, c.1392-1393, 120).

 

-

Avoir grand pitié au coeur de qqc. "Éprouver une grande pitié pour qqc." : Mais, pour Dieu, preingne vous pitié de mon povre enfant, orpheline, desnuee de tout conseil et confort, se vous lui failliez. Quant Uriiens ouy ces piteux mos, si fu moult doulent de la mort du roy et ot grant pitié au cuer des piteux moz qui furent en la lectre. (ARRAS, c.1392-1393, 142).

 

-

Avoir/ sentir joie/ douleur ou coeur : Quant Hermine ouy celle nouvelle, elle ot si grant joye ou cuer qu'elle ne scot que faire. Mais elle n'en monstra nul semblant. Ains monstre qu'elle sente grant douleur ou cuer, et si faisoit elle. (ARRAS, c.1392-1393, 116). Et quant Remond la voit [Mélusine], si fu moult doulent. Hay, dist il, m'amour, or vous ay je trahie par le faulx enortement de mon frere, et me sui parjurez envers vous. Lors ot tel dueil a son cuer et telle tristece que cuer humain n'en pourroit plus porter. (ARRAS, c.1392-1393, 242). ...et par ce fist Gieffroy le grant et horrible et hideux forfait d'ardoir son frere et les moines qui mort ne avoient point desservie. Quant Melusigne ouy ce mot, si ot tel doulour ou cuer qu'elle chey pasmee. (ARRAS, c.1392-1393, 256). Et sachiez que je sens ou cuer plus de doulour de nostre departie Cm. foiz que vous ne faictes, car ainsi fault qu'il soit, puis qu'il plaist a Cellui qui tout puet faire et deffaire. (ARRAS, c.1392-1393, 258).

 

-

Triste de coeur. "Profondément triste" : Lors vint a son seigneur. Si le baise tout en plourant et triste de cuer que il ne disist un mot pour tout l'or du monde ; et prent son cor et lui met sur le pitz. (ARRAS, c.1392-1393, 23).

 

-

De triste coeur. "Le coeur lourd" : Assez tost aprez fist le roy cueillir son paveillon, et entra en mer, et s'en va le plus droit qu'il puet en son pays, pensant de triste cuer aux paroles que Melior, la dame du chastel de l'Esprevier, lui ot dictes. (ARRAS, c.1392-1393, 306).

 

-

Dur de coeur. "Dur, impitoyable" : Haa, dist Presine, qui bien le savoit, faulses et mauvaises, et tres ameres et dures de cuer, vous avez mal fait, quant cellui qui vous avoit engendrees vous avez ainsi pugny par vostre faulx et orguilleux couraige, car c'estoit ce ou je prenoye toute la plaisance que j'avoie en ce monde mortel, et vous la m'avez tollue. (ARRAS, c.1392-1393, 12).

 

-

Amer de coeur. V. amer

 

-

Toucher qqn au coeur : Et sachiez que je pensoye moult fort a un mien affaire qui moult me touche au cuer, et je prye a Dieu qu'il m'en aide a yssir. (ARRAS, c.1392-1393, 25).

 

-

P. méton. [Terme d'affection] : Et lors, a ce mot, Melusigne le va acoler et baisier moult doulcement en disant : Adieu, mon tres doulz amy, mon bien, mon cuer et toute ma joye. (ARRAS, c.1392-1393, 258).

 

2.

[Siège du désir, de la volonté] : Ma dame ma seur, Dieu vous doint joye de quan que vostre cuer desire. (ARRAS, c.1392-1393, 215).

 

-

Croire son coeur : Fuiez de cy, faulx traitre, vous me avez fait par vostre faulx traitre rapport parjurer contre la meilleur et la plus loyal dame qui oncques nasquist après celle qui porta Nostre Createur. Vous m'avez apporté toute doulour et emportez toute ma joye. Par Dieu, se je creoie mon cuer, je vous feroye mourir de male mort, mais raison naturelle le me deffent, pour ce que vous estes mon frere. (ARRAS, c.1392-1393, 242).

 

-

Jurer en son coeur que : Quant le duc Anthoine scot le meschief que les Sarrasins font au roy, si en ot grant pitié et jure en son cuer que pas ne demourra en ce party et que Sarrasins acheteront la peine que ilz font souffrir aux Crestiens. (ARRAS, c.1392-1393, 172).

 

-

Sentir son coeur ferme pour. "Se sentir fermement décidé à" : Et pour ce je vous prie que, s'il a en ceste place homme qui ne sente son cuer ferme pour actendre l'adventure qu'il plaira a Jhesucrist de nous envoier, qu'il se traye a part, car par un seul couart failly est aucunesfoiz une besoingne perdue. (ARRAS, c.1392-1393, 108).

 

-

De bon coeur. "De plein gré" : ...se ilz ne feussent, les Sarrazins les eussent tous destruiz ou tournez a leur loy, qui vaulsist piz que mort corporelle, car ceulx qui a ce se feussent consentu de bon cuer eussent eu dampnacion perpetuelle. (ARRAS, c.1392-1393, 118).

 

-

[Avec idée de sincérité]

 

.

De bon coeur. "Sincèrement, d'un coeur sincère" : Et au chief de V. jours se mistrent les barons en mer, et en brief temps arriverent en Chippre, et compterent au roy Uriien toute la verité de la recueillette que son frere avoit eue en Armenie, et comment il en estoit roy paisiblement, de quoy Uriien loua Jhesucrist de bon cuer. (ARRAS, c.1392-1393, 144). Sachiez qu'il n'a si grant pecheur ou monde que Dieu ne soit plus grant pardonneur et plus debonnaire, quant le pecheur se repent et lui crie mercy de bon cuer et de bonne voulenté. (ARRAS, c.1392-1393, 255).

 

.

De coeur parfait. "Très sincèrement" : ...ceste merveilleuse aventure que je voy ou cours des estoilles que tu as lassus assises dès le commencement du ciel, par haulte science d'astronomie dont tu m'as presté une des branches, de quoy je te doy louer de cuer parfait, et ta Haulte Majesté, ou nulle ne se puet comparer. (ARRAS, c.1392-1393, 19).

 

.

En coeur. "Au fond de mon coeur, sincèrement" : Combien que tu t'estoies parjurez envers moy quant tu mis paine a moy veoir, mais pour ce que tu ne l'avoies descouvert a personne, je le t'avoye pardonné en cuer, combien que je ne t'en eusse point fait de mencion, et Dieu le t'eust pardonné, car tu en eusses fait la penitence en ce monde. (ARRAS, c.1392-1393, 256).

 

3.

[Siège du courage]

 

-

De coeur diligent. "Avec beaucoup de courage" : ...mon dessusdit seigneur (...) a tant fait qu'il en a sceu au plus prez de la droite verité qu'il a peu, et m'en a commandé a faire le traictié de l'ystoire qui cy après s'ensuit. Et je commenceray de cuer diligent, de mon povre sens et povoir, en ay fait le mieulx que j'ay sceu. (ARRAS, c.1392-1393, 1).

 

-

De bon coeur. "Avec courage, ardeur" : Quant Sarrasin percurent que le soudant fut mort, si furent moult esbahiz, ne oncques puis ne se combatirent de bon cuer. (ARRAS, c.1392-1393, 113).

 

-

De haut coeur. "Courageux" : ...le roy d'Ausay (...) qui tenoit un gros baston ou poing, et ordonnoit ses gens moult a droit. Et bien sembloit prince de hault cuer et de haulte emprise. (ARRAS, c.1392-1393, 174).

 

-

Feintise de coeur. V. feintise

 

-

Lascheté de coeur. V. lascheté

 

-

Avoir le coeur de qqc. "S'en sentir le courage" : Se vous avez tant de hardement que vous vous osez vengier de ce tort qu'on vous fait, nous vous aiderons trestuit. Et il leur dist qu'il en avoit bien le cuer et la voulenté. (ARRAS, c.1392-1393, 57).

 

-

Estre plein de coeur. "Être courageux" : Mais le soudant, qui fu plain de grant cuer et de grant vaissellage, ralie sa gent autour de lui, et livre assault a noz gens moult fierement. (ARRAS, c.1392-1393, 112).

 

-

Prendre coeur en soi. "Prendre courage" : Fausse gent, que voulez vous faire ? Encore n'est pas revenu le messaige qui est alez querre le secours au roy d'Ausaiz. Prenez cuer en vous, car vous orrez par temps bonnes nouvelles. (ARRAS, c.1392-1393, 181).

 

-

Reprendre coeur : La renforca grant la bataille, car, quant sa gent le virent remondé, ilz reprindrent grant cuer, et se combatirent moult asprement et y ot moult de mors et de navrez, et d'une part et d'autre. (ARRAS, c.1392-1393, 72).

 

-

Recueillir grand coeur. V. recueillir

 

-

Avoir le coeur plein de vaillance : ... le roy de Chippre (...) estoit bleciez de coup mortel, et ne feust que pour le venin dont le dart estoit entechié, et en pou de temps y paru, car il print mort de cellui coup. Mais il avoit le cuer plain de si grant vaillance que il ne le daignoit monstrer a sa gent, jusques a tant que ly uns des barons apperceut que le roy estoit, du senestre costé de la hanche jusques au talon, tous rouges de son sang, et la place ou il arrestoit, toute tainte et arrousee du sang de son corps. (ARRAS, c.1392-1393, 106).

 

-

Rendre/donner coeur à qqn (de) : Par foy, dist cil, vous me mettez en grant adventure, car, se je suiz prins des Sarrasins, de ma vie n'est rien. Mais pour l'amour de vous et du roy, faire confort et donner cuer et esperance d'estre delivrez du peril ou il est, je me mettray en l'adventure. (ARRAS, c.1392-1393, 93). Et faisoit le roy Uriien si grant semblant qu'il donnoit a ses gens si grant cuer que avecques lui et a son emprise, ilz eussent bien osé combattre de X mille que ilz estoient, que de pié, que de cheval, cent mille payens. (ARRAS, c.1392-1393, 128). Et le chappleiz fu fiers et l'occision de une part et d'autre, car le roy d'Ausaiz ravigoure ses gens et rent grant cuer, et a son poindre fait grant dommage aux Poictevins. (ARRAS, c.1392-1393, 162).

 

-

Tenir (qqn) à grand hautesse de coeur. "Le considérer comme un homme d'une grande noblesse d'âme" : Si [le capitaine] le tient [Urian] a grant haultesce de cuer et a grant vaillance. Et, quant il considere le grant et la facon de Uriien, et la fierté de son visaige, et aussi de Guion, son frere, si dist : Ces gens sont dignes de conquester tout le monde. (ARRAS, c.1392-1393, 93).

 

-

Avoir coeur de fierté de lion envers qqn. "Avoir le courage d'un lion envers qqn" : Ayez cuer de fierté de lyon envers voz ennemis, et entre eulx devez monstrer puissance et seignourie. (ARRAS, c.1392-1393, 87).

 

-

P. méton. Les nobles coeurs. "Les courageux" : Cilz qui ont devocion de vengier la mort de Nostre Createur et de essaucier sa loy, et de aidier au roy de Chippre, si se traye soubz ma banniere, et ceulx qui n'en auront devocion passent par dela le pont. Quant ly noble cuer ouïrent ce mot, si le tindrent a grant sens et a grant vaillance. Si s'en vont tous en une flote ferir dessoubz sa banniere, en lermoiant de joie et de pitié des mos que Uriiens leur avoit dit. (ARRAS, c.1392-1393, 109).

 

4.

[Siège de l'intelligence, de l'esprit] : Et les haulx princes veoient plus cler en leurs affaires par les sciences qui lors estoient aprinses en temps deu, que s'ilz feussent innocent des sciences, et sentoient en brief le vif des conseulx que on leur monstroit. Et ainsi je croy que cuer de noble estrattion qui a la science des nobles vertus des ars dessuz diz ou cuer, qu'il n'en sauroit meserrer si tost que cil qui auroit aprins les ars par avarice de vouloir enrichir (ARRAS, c.1392-1393, 17).

 

-

Priser qqn en son coeur. "L'apprécier" : Or vous lerray un petit de Uriien et de sa compaignie, et vous diray du cappitaine de la ville, qui moult bien advisa l'ost et le maintieng des gens, qui moult le prisa en son cuer, et bien dist que c'estoient gens de fait et de grant emprise, quant si pou de gent emprenoient a contrester contre l'effort du soudant qui avoit plus de cent mille Sarrasins. (ARRAS, c.1392-1393, 92).

 

-

"Savoir intuitif" : Sire, il est mestiers que vous chevauchiez par ceste forest, tous armez, vous et voz gens, par ordonnance, car le lignaige de Jossellin que vous avez destruit, ne vous aiment pas. Si vous pourroient tost porter dommage, se ilz vous trouvoient desgarny, et ly cuers me dist que nous les trouverons assez tost. (ARRAS, c.1392-1393, 71).

 

5.

[Siège du souvenir, de la mémoire] Registrer qqn en son coeur. V. registrer

C. -

P. méton. "Personne"

 

-

Il n'est coeur qui. "Il n'y a personne qui"

 

.

Il n'a si dur coeur au monde qui : Lors demaine la pucelle telle douleur que c'estoit grant pitié a veoir et se deteurtoit et tiroit ses cheveulx, que de l'angoisse qu'elle sentoit il n'a si dur cuer ou monde qui n'en eust eu pitié. (ARRAS, c.1392-1393, 181). Et lors maine tel doulour qu'il n'a si dur cuer ou monde a qui il n'en eust prins pitié se il l'eust veue en ce point. (ARRAS, c.1392-1393, 256).

 

-

Coeur humain : Lors ot tel dueil a son cuer et telle tristece que cuer humain n'en pourroit plus porter. (ARRAS, c.1392-1393, 242).

 

-

Coeur mondain : ...c'est pour le pechié des moines, qui estoient de mauvaise vie et desordonnee ; et en a Nostre Seigneur voulu avoir la punicion, combien que ceste chose soit incongnoissable quant a humaine creature, car les jugemens de Dieu sont si secrez que nul cuer mondain ne les puet comprendre en son entendement. (ARRAS, c.1392-1393, 255).
 

Arras Jocelyne Bernardoff / Jean-Loup Ringenbach

 Article 18/18 
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     CRÈVE-COEUR     
FEW II-2 crepare
CRÈVE-COEUR, subst. masc.
[GDC : crevecoeur ; FEW II-2, 1319a : crepare]

"Grand déplaisir mêlé de dépit" : "O quelle abhominacion et creve cuer aux nobles et au peuple voire quant aux aides de despoillier et apauvrir mille ou IIm personnes pour enrichir un tout seul et tel comme dit est dessus..." (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.2, c.1386-1389, 217).
 

Littérature didactique Hiltrud Gerner

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