Ce que maître donne et valet pleure sont larmes perdues : Le chevalier Thierry, cuidant que le roy lui deust faire raison du coup queRenouart lui avoit donné, se complaigny lors en monstrant sa playe que Renouart lui avoit faicte. Si regarda le roy l'enfant par mautalant, et lui demanda pour quoy il avoit ainssy frapé. Et lors luy respondi Renouart : Je le fery voirement, sire, fet il, pour tant qu'il reproucha mon mengier par dessus voustre commandemenet, et si mauldisi le pere qui m'engendra et la mere qui me porta et nourry." Si n'en fist ly rois qu'une risee, mais il parla au chambellan, disant : "Ce que maistre donne et serviteur pleure sont lermes pardues, sire chevalier, fet il ; pour tant le dy que je ne veill mye que on reffuse rieng a Renouart, et mal soit de l'eure [qu'il] ne vous octeist [l. occeist (?)] à l'eure qu'il vous fery, quant a mengier son saoul lui reffusastes, ce que rien ne vous couste (Guill. Orange T.H.G., t.2, p.1450, 842).

Rem. Morawski 1774 : Que sires done et sers ploure ce sont lermes perdues ; Hassell 146, L19.
 

"Larme" : ...de larmes si oeil A mouller pristrent haultement (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 21).
 

"Larme" : Lors la femme heureuse sera Que ne norrira nulz enfans, Si terrible sera ce temps ! O femmes, voz lermes müés ; Sur vous mesmes, femmes, plorés ! [Réf. à Luc 23, 28] (Pass. Auv., 1477, 191).

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En pleurs et larmes. "À chaudes larmes" : Tout jour, mon amy, je suspire En pleurs et larmes sans cesser. Aprés tumber tantost respire (Pass. Auv., 1477, 220).
 

A. -

"Larme" : Or me passeroit mon meschierfz Mesque je peüse aler Au doux Jhesu a ly parler, Ses piedz de mes larmes laver, Et puis de mes cheveux panner Et aprés oindre doucement De ce precïeulx oignement. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 137).

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Loc.

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Le coeur me fond en larmes/de larmes : Vo mal entre en moy si parfont Qu'en larmes tout le cuer me font. (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 198). J'en ay en moy si grant pitié Que le cueur me font tout de lermes (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 715).

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Se noyer de larmes. V. noyer

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Pleurer de larme : Beau filz, moult m'as amee. Je suis creante et ferme. Ne doys estre blasmee Se je pleure de lerme (Myst. Pass. Amb. R., c.1474-1500, 65).

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La larme m'en vient à l'oeil : Ha ! Messeigneurs, je meurs de deul, De doleur que j'é en corraige, Que la larme m'en vient a l'eul De voir advenir tel dommaige ! (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 444).

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Les larmes me cheent des yeux : Mais j'ay au cueur grant desplaisance, Que les larmes me cheent des yeulx, De mes freres tant vertueux, Tant honnestes, tant excellant. Or ne sai ge ou il sont eulx deux, Dont je seuffre doleur moult grant. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 560).

B. -

P. ext. "Goutte"

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[Comme expr. d'une valeur minimale] : Le peuple est en grant frëour Pour la grant povreté de l'eauue, S'il n'en a une seulle larme Dont ce puisse ressassier. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 37). Mes tant que d'Anglois soit gendarme A Orleans, soit petit ou grant, Dy saubt [l. du saint] huille ne aura larme [pour sacrer le roi] Qu'i ne soyez chassez avant (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 465).

C. -

[P. anal. de forme] "Perle en forme de larme" (GAY ; FEW) : Ça, Frigalet, je te diray : Va noz chevaulx appareillier, Et pance de les estrilier ; Puis leur mettras leur seelle d'armes Et noz arnois garnis de larmes. (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 47).
 

A. -

"Larme" : ...Combien qu'adonc Desconfors la cité Prendre cuida quant lermes de pitié Vit que ploroit hors par compassion Cil dignes puiz dont j'ay fait mencion (Mir. Theod., 1357, 132).

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Loc. adv.

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En larmes : Je m'en alay, sanz attendue, En lermes, en mon oratoire, Deprier la dame de gloire (Mir. abbeesse, 1340, 96). Mais en grans pleurs et en grans lermes Sera de ma vie li termes. (Mir. pape, 1346, 381).

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La larme à l'oeil : Qu'est ce, belle fille ? quel chiére ? Touzjours vous truis la lerme a l'ueil (Mir. st J. Cris., c.1344, 255).

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Loc. verb.

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Avoir la larme aux yeux : ...hé ! Dieux, Bien doi la lerme avoir aux yeux Et plorer continuelment (Mir. Theod., 1357, 108).

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Fondre en larmes : Il me font si estre esplourée Que le cuer en lermes me font, Pour la grant pitié qu'il me font (Mir. nonne, 1345, 350). Helas ! bien devons de douleur, Sire, en lermes fondre et remettre (Mir. st Lor., 1380, 144).

B. -

Au fig. "Chagrin, affliction" : ...la devote ame qui a douleur et compassion de la mort son espoux Jhesu Crist, et desir d'avoir larmes et contriccion de la passion son createur (Mir. st Guill., c.1347, 3).
 

"Larme" : Que ce soit en aucune maladie et les lermes fluent des yeux voluntairement, ce signe n'est ne bon ne mal a la maladie ; mais emission de lermes non voluntaires est mauvaiz signe. (SAINT-GILLE, A.Y., 1362-1365, 76).
 

"Larme" : Veons comment la premiere damoiselle fait son office et appelle le Saint Esperit, comme en se complaignant et huchant a basse chierre, a face esplouree, a lermes et gemissemens : "O tres doulx et tres begnin Saint Esperit..." (GERS., Pent., p.1389, 74). ...tu pues gemir et plourer pour eulz, et je n'entens pas seulement de larmes corporelles, combien que c'est fort que cuer soit au vif doloreux qui ne le monstre par dehors, mais j'entens de pleurs et de larmes qui sont par dedans. (GERS., Déf., 1400, 229). Esjouyr se doit qui tellement congnoistre son Dieu pourra. (...) Et a ce profittent plus larmes, pleurs et souspirs devotz que cler engin, ne estude quelconque. (GERS., Trin., 1402, 172).
 

"Larme" : Et croy certainement qu'il n'est si dur cueur au monde (...) qui n'eust esté commeu et provocqué a lermes de piteuse compassion. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 285).
 

"Larme, goutte qui s'écoule des yeux sous l'effet de la douleur ou de l'émotion" : Et a ces paroles la sourse des larmes de son cuer saillirent de ses yeux tellement que la langue cessa pour leur donner paix. (LA SALE, J.S., 1456, 96).
 

"Larme" : Et dist einsi Qu'elle soloit avoir loial ami Qui loiaument l'amoit, et elle li. Mais la mort l'a de ce siecle parti. Et la valour, Le sens, le pris, la prouesse, l'onnour, Qui fu en li, si comme elle dist, flour, Le fist des bons estre tout le millour. Pour ce pensoit Parfondement, ne onques ne cessoit, Et en pensant le plouroit et plaingnoit, Si que son vis en larmes se baingnoit. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 116). Et en moy tournant arrousay De larmes mon cuer et mes yeus Et ma poitrine en pluseurs lieus, En gettant un dolereus plaint Com cils qui moult se duet et plaint. (MACH., R. Fort., c.1341, 76). Grant erre Fu Susanne la amenee, De tous costez avironnee De ses parens, de ses amis, A ses deus mortels annemis, Et aussi devant tout le pueple. Mais chascuns et chascune pueple Sa face de larmes piteuses Pour les nouveles dolereuses, Car on ne tenoit milleur dame Ou païs, ne plus preude fame. (MACH., C. ami, 1357, 8). Brief, d'enfer toutes les roïnes Plouroient larmes serpentines, Ce qu'onques mais ne fu veü ; Et ce si forment esmeü A le dieu de la chartre obscure Qu'il fist mander grant aleüre Erudice, et si la rendi Au pouette qui l'atendi. (MACH., C. ami, 1357, 90). ...toute Troie fu destruite Et tuit li sien mort ou en fuite, Et il meïsmes en fu mors, Dont Heleinne ot meint dur remors Et ploura meinte larme amere O Ecuba, sa chiere mere. (MACH., C. ami, 1357, 94). Peinnes, dolours, larmes, soupirs et pleins, Griès desconfors et paours de morir Sont en mon corps en lieu de cuer remeins, Qui ne se puet de ma dame partir. (MACH., L. dames, 1377, 138).

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[Dans un cont. métaph.] : Et pour ce sont mi chant de rude affaire, Qu'il sont tuit fait d'un cuer plus noir que meure, Triste, dolent, qui larmes de sanc pleure. (MACH., Bal., 1377, 557).

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Fondre en larmes : Et au partir soupiranment Pris a plourer si fondanment Qu'en plours et en larmes fondoit Mes cuers qui tous s'en confondoit. (MACH., R. Fort., c.1341, 28).

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Pleurer à chaudes larmes : Mors est li bons roys, c'est damages. Plourez, honneurs et vasselages, Plourez enfans, plourez pucelles, Plourez dames et damoiselles, Plourez aussi toutes gens d'armes, Plourez sa mort à chaudes larmes. (MACH., P. Alex., p.1369, 273).
 

A. -

"Pleur" : ...a ces parolles, larmes en grand abundance saillirent de ses yeulx (C.N.N., c.1456-1467, 141). ...a peine que les larmes ne luy sailloient des yeulx (C.N.N., c.1456-1467, 535).

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En partic. [En tant qu'expression du chagrin] : Si entendit tantost sa mere que ces larmes vouloient dire (C.N.N., c.1456-1467, 133).

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[Expr. volontaire] : ...pluseurs femmes ont larmes a commendement qu'elles espandent toutesfoiz ou le plus souvent qu'elles veulent (C.N.N., c.1456-1467, 93). ...[le clerc] fist beaucop prier, et a tresgrand crainte par semblant, et a grand abundance de larmes a volunté se laisse ferrer. (C.N.N., c.1456-1467, 94).

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[Expr. involontaire] : ...elle ne scet sa contenance que de gecter larmes a grande abundance (C.N.N., c.1456-1467, 45). ...oncques mot ne sceut dire, tant empescherent sa doulce langue les larmes (C.N.N., c.1456-1467, 145).

B. -

"Ornement en forme de larme" : ...je vous donne ceste verge, qui est d'or esmaillée de larmes noires. (C.N.N., c.1456-1467, 167).
 

Fondre en larmes. "Se mettre à pleurer abondamment" : Comment la ducesse sa mere estant emprés ly [son fils malade] fondoit en larmes (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 115).
 

"Ornement en forme de larme" : ...pour la façon et pour le déchiet de trois petitz fillez d'or, esmaillez et taillez dedens et dehors, en chacun assis une larme de diamant (Comptes roi René A., t.1, 1452, 291). ...une bate d'or, faicte pour une larme de jaspin ; et pour une autre bate d'or, faicte pour une pierre, faicte en façon de coquille de saint Jeacques (Comptes roi René A., t.1, 1453, 299). ...ung riban garny d'une lerme d'or d'un bout et d'une esguille de l'autre bout (Invent. biens Ch. Savoie T., 1484, 427).

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Fait à larmes. "Orné de perles en forme de larme" : ...ung grant colet d'or, fait à larmes, garny de trois dyamans, trois rubis et de six perles (Comptes Lille L., t.2, a.1467, 112).
 

"Larme" : Las ! Mon amy [Remondin], or sont noz amours tournees en hayne, noz doulceurs en durté, noz soulaz et noz joyes en larmes et en plours, nostre bon eur en tres dure et infortuneuse pestillence. Las ! Mon amy, se tu ne m'eusses faussee [Mélusine], je estoye gettee et exemptee de paine et de tourment (ARRAS, c.1392-1393, 256). ... les lermes lui cheoient des yeulx a si grans ruisseaulx que toute sa poittrine en estoit arrousee (ARRAS, c.1392-1393, 257).