Dictionnaire du Moyen Français (1330-1500)

http://www.atilf.fr/dmf/definition/langue 
     LANGUE     
FEW V lingua
LANGUE, subst. fém.
[ ]

A. -

[Organe situé dans la bouche]

 

1.

[La langue comme organe de la parole]

 

-

Où la dent souffre va la langue V. dent

 

-

Qui langue a, à Rome va. V. Rome

 

-

Tel vous fait belle chère par devant, qui vous trait la langue par derrière V. chère

 

-

[Mauvaise langue]

 

.

Celui-là a langue de chien, qui aboye le bon et le mauvais V. chien

 

.

[Moralité de la fable De la Mouche et du Fromy] La langue qui est venimeuse parole n'aura gracieuse : [La mouche dénigre la fourmi ; celle-ci lui répond de la même manière] On ne doit point despriser autruy en soy louant, car qui dit villennie et blasme d'autruy, il doit doubter que on n'en die autant de luy et pour ce, beau parler et gracieux requiert que on luy ayde aussi ; cellui de qui le lait parler vient, requiert qu'on dit die autant de luy. La langue qui est venimeusec Parolle n'avra gracieuse. (Ysopet III B., c.1400-1500, 410).

 

.

Langue mal sage épand les trésors du coeur : Car le cognoissance des choses si passe loyaument a l'ame par le service de l'oil et de l'oreille, et souvente foiz la langue mal sage si espant les tresors du cuer. (FOUL., Policrat. B., V, 1372, 0).

 

.

Langue tout le monde détruit : Tiens aussi ta langue soubz resne, Si tu vieulx durer en bon regne. Langue, pour faire compte rond, Tout le monde destruit et rompt (ALECIS, ABC P.P., 1451, 48).

 

.

[Moralité de la fable De l'Aigle et de la Limace] Male langue par sa parole tout le monde engine et affole : Male langue par sa parole Tout le mode engine et afole. L'en ne doit mie tantost croire Que chascune chose soit voire, Car par trop grant credulité Chiet l'en en grant necessité. Oÿ fire va par la vile ; Qui trestout croist, forment s'avile. (Ysopet I-Avionnet B., c.1339-1348, 225).

 

.

Périlleuse chose est de mauvaise langue entre amants : ...il veoit entre elles [des pucelles à leur fenêtre] la Pucelle aux Deux Dragons apparoir tant belle, ce lui estoit advis, qu'elle passoit de trop toutes les autres. Mais encore doubloit plus sa joye en ce qu'elle tiroit du feurre l'Espee Vermeille et la conjoÿssoit et disoit tant que le chevalier l'ouoit : "Certes, perilleuse chose est de mauvaise langue entre amans, car on se encline plus tost a croire le mal que le bien et mal a fait qui a dit du chevalier le contraire de ce que advenu en est." (Percef. V, R., c.1450 [c.1340], 488).

 

.

Pire est coup de langue que d'épée : ...Pis vault le coup de langue que d'espee d'assier ! (Renaut Mont. B.N. V., c.1350-1400, 219). Ganelo, dist Ogier, laissiés vostre plaidir, Gardés ne les veullés traïtours apeler. Mais s'il sont traïtour et font moult a blasmer Qui preudomme conseullent honnir et vergonder : Pis vault le coup de langue que d'espee d'assier. (Renaut Mont. B.N. V., c.1350-1400, 219). Dy en aprés a ceste bouche que elle soit sur sa garde comment elle parlera peu, atrait et bas (...) ; pieur est cop de langue que d'espee. Garde soy de mansonges, perjuremens, flaterie, mesdire d'autruy. (GERS., Quatr. mercr. Carême G., 1402, 1088). Car oncques morsure de serpent, cop d'espee ou autre pointure ne fut tant venimeuse comme langue de personne envieuse, car elle frappe et tue souvent soy et aultre, et aucunes fois en ame et en corps. (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 148).

 

Rem. Hassell 85, C326 ; DI STEF. 474a, langue.

 

.

[Prov. équivalent] On fiert plus fort de la langue qu'on ne ferait d'une toise ("baguette") : De chou que j'ai parlet, dist li sages, me poise ; De chou que me suis teus, n'est drois q'en aie noise. Taisirs plus que parlers toutes gens priès aquoise ; On fiert plus fort de langhe que ne fache de toise. (GILLES LE MUISIT, Poésies K., t.1, c.1347-1353, 192).

 

Rem. Cf. aussi Morawski 662 : En la langue gist la mors et la vie.

 

-

[Moralité de la fable Du Loup et de la Truie ; la langue qui endort pour mieux tromper] Quand langue doucement parole, elle endort les gens comme citole... : Quant langue doucement parole, Endort la gent comme citole, Com quinterne, comme viëlle, Psalterium, douceine belle. Mès l'ipocrites blandissieres, Li faux mauvès, li puans lierres Deçoit par son barbotement Qui ne resiste justement. (Ysopet I-Avionnet B., c.1339-1348, 236).

 

Rem. Cf. aussi Morawski 662 : En la langue gist la mors et la vie, 1015 : Langue n'a pas os et se les brise.

 

2.

[La langue comme organe du goût] Plus de gens meurent de coup de langue que de coup de lance : Le secont damaige qui vient de gloutonnie est maladie et maladies de corps, car selonc le proverbe commun, plus de gens muerent de caup de langue que de caup de lance, et l'Escripture dit que en planté de viandes ne fauldra pas maladie. (MÉZIÈRES, Vertu sacr. mar. W., c.1384-1389, 285).

 

Rem. Cf. aussi Morawski 1016 : Langue n'a pas os et se les bris(s)e

 

3.

[Chez l'animal] Celui-là a langue de chien, qui aboye le bon et le mauvais V. chien

B. -

[Tige perpendiculaire au fléau d'une balance, indiquant l'équilibre des plateaux] La langue de la balance demonstre à chacun la verité du poids V. balance
 

Lexique de proverbes Pierre Cromer


© ATILF - CNRS & Université de Lorraine 2015
La présente ressource est produite et diffusée par l’ATILF à des fins de consultation pour l’enseignement et la recherche, à l’exclusion de toute exploitation commerciale. La citation d’un extrait de la ressource au sein d’une publication scientifique est autorisée sous condition de porter la mention suivante :
DMF : Dictionnaire du Moyen Français (DMF 2015), http://www.atilf.fr/dmf, ATILF - CNRS & Université de Lorraine.