Dictionnaire du Moyen Français (1330-1500)

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     SEIGNEUR     
FEW XI senior
SEIGNEUR, subst. masc.
[DÉCT : seignor ]

A. -

"Seigneur, haut personnage de qui dépendent des terres et des personnes"

 

-

[En corrél. d'oppos. avec escuyer, dans un cont. métaph.] : Fault il que filz en nepveu change, Laisser le maistre pour disciple ? Mon Dieu, ce m'est chose terrible : Le prince change en chavalier, Le seigneur en son escuyer, Le createur change pour creature, Et le paintre pour partraiture. (Pass. Auv., 1477, 221).

 

Rem. Réf. au passage où le Christ en croix confie sa mère à l'apôtre Jean (Jean 19, 26-27).

B. -

[Titre honorifique donné à un personnage de haut rang]

 

1.

[En empl. discursif] : Herodias, venés sa, m'amie ; Faictes dancer voz damoiselles Notes, chansons, dances nouvelles, Pour resjoïr tous les seigneurs. (Pass. Auv., 1477, 88).

 

-

P. antiphr. iron. [Désignant des bourreaux] : Il seroit bon a mon semblant, Mere, d'icy nous despartir, Car ces bons seigneurs maintenent Veulent le corps ensevelir. (Pass. Auv., 1477, 247).

 

-

[Précédé d'un adj. poss.] : Alons, de par nostre seigneur ! (Pass. Auv., 1477, 275). Mauldit pecheur, Suis fol et nice D'avoir ce Jhesus condempné, Car j'ay eu peur Perdre l'office De mon seigneur Doulx et propice. (Pass. Auv., 1477, 276).

 

.

[Suivi d'une appos.] : Tel festiement pas ne me plait Que aussi desplait A mon seigneur le roy, mon frere. (Pass. Auv., 1477, 107).

 

2.

[En empl. appellatif souvent empl. à l'adresse d'un supérieur, parfois dans d'autres circonstances avec une valeur affaiblie : monsieur, cher ami, etc.]

 

a)

[Non précédé d'un adj. poss.]

 

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Au sing.

 

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[D'un serviteur à son maître] : Seigneur, je y vaiz ; je veulx taster Si fait bon boire a ceste tasse. (Pass. Auv., 1477, 89).

 

.

[Entre pers. de rang comparable] : Seigneur, ne vous veulhe desplaire Ce que nous voulons demander. (Pass. Auv., 1477, 227).

 

.

[Entre familiers ; en corrél. d'identité avec ami] : Je le veulx, seigneur et amy. (Pass. Auv., 1477, 272).

 

.

[D'un commerçant ou d'un artisan à un client] : Et vous, seigneur, si vous agree, Dictes pour quoy estes venus. (Pass. Auv., 1477, 177).

 

-

Au plur. : Puis, seigneurs, qu'advés fait l'office, Les sancts prophetes vouldroye lire. (Pass. Auv., 1477, 116).

 

.

[D'un haut fonctionnaire à des dignitaires religieux] : Dictes, seigneurs ! (Pass. Auv., 1477, 227).

 

.

[Suivi d'un adj. qualificatif] : Seigneurs Juïfz de grand renom, De bon cuer je vous remercie, Car vous m'avés saulvé la vie. (Pass. Auv., 1477, 173).

 

.

[D'un héraut à la population (en corrél. d'association avec dames : mesdames et messieurs)] : Seigneurs et dames quy cy estes, Ouyés les ordonnances faictes Par noz grans princes de la loy (Pass. Auv., 1477, 180).

 

b)

[Précédé d'un adj. poss.]

 

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Au sing. : Mon seigneur, si vous est agreable D'aler disner, nous vous suivrons. (Pass. Auv., 1477, 90).

 

.

[D'un serviteur à son maître] : Mon seigneur, je y vaiz sans falir. (Pass. Auv., 1477, 127).

 

.

[D'un commerçant à un client] : Mon seigneur, combien en voulés ? (Pass. Auv., 1477, 235).

 

-

Au plur.

 

.

[D'un hôte à ses invités] : Hee, mes seigneurs, que doy je faire ? (Pass. Auv., 1477, 96).

 

.

[En corrél. d'identité avec amis] : Sus, mes seigneurs et bons amis, Faison au jour d'uy bonne chere ! Nulle despence ne soit chere (Pass. Auv., 1477, 88).

 

.

[Entre familiers ou amis] : Que vous semble, mes seigneurs, De cest homme qui si bien dit ? (Pass. Auv., 1477, 117). Plus grant bien faire ne porriés, Mes bons seigneurs, je vous affie ! (Pass. Auv., 1477, 243).

C. -

RELIG. [Titre donné à Dieu]

 

1.

[En empl. discursif]

 

a)

Le Seigneur des vertus : Le seigneur des vertus, qui sort Du monde. Il est roy de gloire. (Pass. Auv., 1477, 227).

 

Rem. Passage tiré du Ps. 23, 10 ("Dominus virtutum ipse est rex gloriae"). Dominus (ou Deus) virtutum est une appellation fréq. dans les Psaumes.

 

b)

[Précédé d'un adj. poss.] : Or sa, de par nostre seigneur, Arme virtueuse, loués Dieu ; Et nous vous manrons en ung lieu Ou vous varrés les sanctz prophetes Et les sanctz peres, esqueulx estes Tramise pour denuncïer Leur saulveur. (Pass. Auv., 1477, 101). Mon enfant, c'est nostre seigneur, C'est Dieu tramis en Israël. (Pass. Auv., 1477, 129). Il fault que j'abaisse ma face, Puis que voy mon bon seigneur, Celluy que les pechés esface. (Pass. Auv., 1477, 152). Hé, Maries, Seurs amies, - venés baiser vostre seigneur ! (Pass. Auv., 1477, 255).

 

-

[En corrél. d'identité avec pere] : Helas, Dieu, que deviendrey je, Veu qu'en my age Je pers mon seigneur et mon pere ? (Pass. Auv., 1477, 181).

 

2.

[En empl. appellatif]

 

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[Précédé d'un adj. poss.] : Tu devries bien lougis changer Alheurs qu'advec moy, mon seigneur. Ha, las, je suis ung grant pecheur, Indigne de ta companie. (Pass. Auv., 1477, 127).
 

Passion d'Auvergne Jean-Loup Ringenbach


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