Dictionnaire du Moyen Français (1330-1500)

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     DEVOIR1          DEVOIR2     
FEW III debere
DEVOIR, verbe
[AND : deveir ; DÉCT : devoir ]

"Devoir"

I. -

Devoir qqc. à qqn

A. -

[L'obj. désigne ce dont le suj. est tenu de s'acquitter] : Quant le vi [escrin], ne me deportay, Mais le pris (...) Et dedans ay trouvé d'avoir Autant qu'il [bourgois] me pouoit devoir (Mir. march. juif, c.1377, 222).

B. -

"Être tenu à qqc. par l'équité" : Tu as bien tant a Dieu servi Que paradis as desservi Et que sa gloire t'est deue (Mir. st Guill., c.1347, 44).

C. -

Part. passé en empl. subst. masc.

 

-

"Dette" : En tel deu nous trebucha Que pur homme de le paier (...) Ne fu souffisant (Mir. st Val., c.1367, 142). DEUXIESME ESCUIER. (...) Conmandez leur [aux pelerins] sanz detrier Paier leur deu. ZOILE. Seigneurs, il me fault mon treu Ainçois que plus avant ailliez (Mir. Pierre Changeur, c.1378, 287).

 

-

"Devoir, obligation"

 

.

Faire son deu : ...quant ja failli sera jour Ou que soit les enterrerons, Et je cuide que nous ferons Nostre deu. (Mir. Barl. Josaph., c.1363, 369). DIEU. Nous avons fait nostre deu : R'alons nous ent. (Mir. Amis, c.1365, 63).

 

.

Faire son deu de qqc. : GOBIN. (...) Tenez, mon seigneur : est ce ycy L'escrin que demandez avoir ? (...) LE BOURGEOIS. Tu en as bien fait ton deu, Que c'est celi que je demande. (Mir. march. juif, c.1377, 204). TROISIESME POVRE. Je mesprendroie malement, Puis que s'aumosne ay receu, Se n'en, faisoie mon deu ; Pour ç'a genouz me vueil ci mettre Et pour li Dieu (...) prier. (Mir. st Alexis, 1382, 320).

II. -

Devoir + inf.

A. -

[Marque l'idée d'obligation]

 

1.

[Une obligation au regard de la morale, de l'usage]

 

-

[Obligation au regard de la morale] : ...femme ne doit concepvoir lignie fors de son mari (Mir. femme roy Port., c.1342, 149). ...puis que nous sommes fréres, nous nous devons entreaidier (Mir. st Val., c.1367, 122).

 

-

[Obligation au regard de l'usage] : LE PAPE. (...) cil qui les devoit Deservir [lampes] lui et son lignage Ay franchy d'ycellui servage (Mir. pape, 1346, 373).

 

-

Empl. impers. : LA NIEPCE. Cousine, je ne vous fail point ; Si vous doit de moy souvenir, Quant vous pourrez regne tenir De royauté. LA FILLE. (...) Cousine, ja ne vous faudray (Mir. femme roy Port., c.1342, 176).

 

2.

[Une obligation tirée de l'expérience, imposée par une finalité pratique] : CONSTANCE. (...) Je ne scé se ce sont veneurs Ou se ce sont de gens robeurs. Partons de cy. YSABEL. C'est bien a faire, car aussi Ne sont il pas de nous moult loing ; Si devons avoir plus grant soing De nous garder. (Mir. Berthe, c.1373, 231). ...doubter Maishuy Sarrazins ne devons, Puis que le champ gangnié avons (Mir. Rob. Dyable, c.1375, 158).

 

3.

[Dans un sens affaibli, une obligation née d'une simple conformité à l'ordre des choses]

 

a)

[En parlant de pers.] "Avoir lieu pour qqn de" : Nous devons bien merveille avoir Que mon seigneur est devenuz N'en quel lieu il s'est tant tenuz, Quant ne revient. (Mir. femme roy Port., c.1342, 166). Helas ! bien devons de douleur, Sire, en lermes fondre et remettre, Quant nostre vray seigneur (...) Nous fault veoir jesir en biére. (Mir. st Lor., 1380, 144).

 

b)

[En parlant de choses] "Avoir pour effet (sur qqn qui a l'obligation de s'y plier) de" : A tout cuer embelir et plaire Doit qu'il vous serve nuit et jour (Mir. nonne, 1345, 325).

B. -

[Marque l'idée de nécessité, de conformité à l'ordre des choses]

 

1.

[Nécessité inhérente aux choses] : L'ABBEESSE. (...) Amours m'assault et me guerrie Pour mon clerc (...), Car sodainement monstré m'a Son maintien, qui par est si gent Qu'il doit bien plaire a toute gent (Mir. abbeesse, 1340, 66). Jehan, conme li Dieu messages, Te demant a avoir baptesme Et la sainte huile et le saint cresme Qui y doit estre. (Mir. st J. Cris., c.1344, 284).

 

2.

[Dans un sens affaibli]

 

a)

[Marque l'idée d'un avenir déjà déterminé] : J'ay oy dire qu'en ce jour Doit avoir feste en ceste ville (Mir. ev. arced., c.1341, 126). C'est la nuit que mon seigneur doit Joir de sa fille (Mir. femme roy Port., c.1342, 173). ...une des plus grans [joies] si fu quant l'ange Gabriel lui apporta [à Marie] les nouvelles que la paix devoit estre faite entre Dieu et humain lignage (Mir. nat. N.S.J.C., c.1343, 206).

 

b)

[Dans un système hypothétique (complet ou non), marque l'idée que normalement la relation hypothétique est vérifiée] : Estat deust mener de conte, S'il fust sages et diligens, Et il n'est que robeur de gens (Mir. Rob. Dyable, c.1375, 4). J'ay bien cuidié qu'en deux partir Deust mon cuer pour s'amistié, Tant me prist de li grant pitié (Mir. ste Bauth., c.1376, 113).

 

c)

[En constr. interr. (avec effacement de l'inf. ?)] Que ce doit ? "Comment cela se fait-il ?" : LE SEIGNEUR. Amie, voulentiers seroie Bien de vous, se il vous plaisoit. LA DAME. Doulce mére Dieu, que ce doit ? Mon seigneur, qu'avez vous pensé ? (Mir. enf. diable, c.1339, 9).

 

-

[Suivi d'une prop. introd. par que] "Comment se fait-il que... ?" : Dites li qu'elle soit ysnelle D'un po venir parler a moy, Et que ce doit que ne la voy Plus que ne fas. (Mir. roy Thierry, c.1374, 310).
 

Miracles Pierre Kunstmann


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