Dictionnaire du Moyen Français (1330-1500)

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     AVISER     
FEW XIV visus1
AVISER, verbe
[T-L : aviser ; AND : aviser1 ; DÉCT : aviser ; FEW XIV, 535b : visus1]

I. -

Empl. trans. dir. [D'un animé ; avec l'idée d'une activité de l'esprit tournée vers l'extérieur]

A. -

[Le compl. désigne une pers.] Aviser qqn. "Le prévenir (d'un éventuel danger)" : Encores, y avoit la garde de la boiste et de l'aguille, qui advisoit en alant cellui qui tenoyt le tymon, affin que la nef feist sa droicte voye. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.1, c.1386-1389, 542).

B. -

[Le compl. désigne un inanimé concr. ou abstr.] Aviser qqc. "Découvrir, distinguer, reconnaître qqc." : Reviens avec moy et me regarde moy, qui suis chose espirituelle et sans parties, se d'aventure tu en oïras aucunes nouvelles. Mon Ame, je l'ay desja ainsy fait. J'ay regardé et advisé du tout en tout quelle tu es, comme grande est ta memoire, clere ton intelligence, franche ta voulenté, ton essence immortelle, ta vie espirituelle (GERS., Trin., 1402, 157). Derrainement, le second point, Qui en la fin du Livre est joint, Enseignera les medicines Assez suffisantes et dignes, Selon que humain entendement Les peut aviser bonnement, A préserver et asseurer, Délivrer, guérir et curer, De la boce ou de pestillence (LA HAYE, P. peste, 1426, 73). ...cest que tu par effect viues bien et faisant et mectant a effect ce que tu as apris par lecon en la maniere que tu as aduise par saincte meditacion, auecques laide de dieu que tu as impetree par oroison (CIB., p.1451, 178).

 

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"Faire savoir" : Le coq qui avise les heures et qui, ce samble, les enseigne en chant, aussi come pour esveillier les endormis et pour les paresceux exciter a bonne euvre, peut estre raportés as marchans dont Mercures est dieux (EVR. CONTY, Eschez amour. mor. G.-T.R., c.1400, 255).

 

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"Chercher à découvrir, examiner" : Item je suppli tiercement à toute gent d'entendement, Voulans aviser à loisir Ce livret, jouxte leur plaisir, à le corriger de leur grace, S'ilz voient besoign qu'on le face. (LA HAYE, P. peste, 1426, 166).

II. -

Empl. trans. indir. [Avec l'idée d'une activité de l'esprit tournée vers l'intérieur] Aviser à qqc. "Réfléchir à qqc." : Mais avisons a l'exemple desja touché du medecin et cirurgien, nous entendrons comment selon divers cas saint Pol avoit a muer sa predicacion et sa correction (GERS., P. Paul, a.1394, 506). ...icelui roy Daire ayant une greve doleance en l'un des piez, où nul medicin ne povoit donner remede, pour la grande experience dudict Democedes fut ventillé au roy et fut envoyé querir, lequel incontinent advisa au cours de la Lune, loing du membre. Aussi à l'umeur peccante vit la disposicion du ciel convenable pour y fere applicacion et le fist (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 52 v°).

 

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Aviser a faire qqc. "Penser à faire qqc." : Aucuns dient qu'il fut aussi cause et donna conseilh que le roy Cambises fist escorcher le faulx juge, sur la peau duquel il fist asseoir son filz en la chaise de justice ad ce qu'il advisast à sentencier droit. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 46 r°).

 

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Le plus souvent à l'impér. Aviser (comment/que). "Prendre conscience" : O tu, qui blasmes saint Pierre pour ce qu'il renia son maistre, ou qui pour ce veulz tes pechiez excuser, avise, je te prie, comment a ung seul regart de Jhesu Crist, il se converti soudainement a repentence tres amere, en pleurs et en gemissemens continuelz. (GERS., P. Paul, a.1394, 489). ...mon chier enfant, entens a moy, regarde moy, escoute moy ! Avise comment la main de la justice de Dieu est sur moy mise, qui par droit me tient en ce feu, en ceste flambe, en ceste tres angoisseuse affliction (GERS., Déf., 1400, 227). Car il est escript ou livre qui s'apelle DEUTERONOMIUM ou derrenier chapitle ou cantique de Moyses, ouquel Dieu parle a son peuple d'Israel et dist : "Advisez et sachiez que je suis seul et que aultre Dieu n'est si non moy." (Somme abr., c.1477-1481, 103).

 

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[Introduisant une prop. interr. indir.] : En surplus aumosne vault en tant que elle oblige celuy qui la recoit a prier ; mais s'il n'en fait riens, l'aumosne quant a ce est perdue ; mais elle vault en autre maniere : en tant que c'est oeuvre bonne et penible faicte pour l'amour de Dieu. Si doit on bien adviser a qui on donne, par especial se c'est grant chose. (GERS., Déf., 1400, 238). Car en tel cas est le conseil, En quelque point soit le Soleil, De clorre tousdiz celle part Où le dangier a son esgart, Sauf par art céler ou vitrer Aucuns lieux, pour administrer Aucune clarté ou lumière En l'ostel par quelque manière, Et, pour mieulx garder de l'outrage, Doit aviser tout homme sage De quoy sourdra prouchainement Le venimeux encombrement, Qui pluseurs cuers destraint et serre Ou sourt de l'air ou desoubz terre (LA HAYE, P. peste, 1426, 79).

 

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Empl. abs. "Réfléchir" : Si n'est pas tout gaing que de soy obligier a autruy par les benefices tenir, ou recevoir autruy argent. Et pour ce les religieux doivent yci aviser, et autres de l'Eglise. (GERS., Déf., 1400, 236).

III. -

Empl. pronom. Soi aviser de qqc.

A. -

"Prendre conscience de qqc." : Plus doulz amy avoir tu ne pourroyes ; mais, en mon Dieu ! de ce t'avise qu'il est tres plain de jalousie, et ne veult point que tu aymes autre chose quelconque plus que luy (GERS., Concept., 1401, 413).

B. -

"S'imaginer qqc., s'appliquer à trouver qqc. pour quelque fin" : Pour quoy nous devons savoir que Tulles dit qu'il est necessité que le bon orateur ait cinq choses en soy, s'il veult bien ordener sa parole a son droit, c'est assavoir invencion, disposicion, elocucion, memoire et pronunciation. C'est a dire qu'il se doit pourveir premierement et aviser d'aucunes choses vraies ou semblant estre vraies, qui facent apparoir sa cause estre bonne et prouvable. (EVR. CONTY, Eschez amour. mor. G.-T.R., c.1400, 255).
 

Littérature didactique Hiltrud Gerner


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