Dictionnaire du Moyen Français (1330-1500)

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     BOUCHE1          BOUCHE2     
FEW I bucca
BOUCHE, subst. fém.
[T-L : boche ; DÉCT : boche ; FEW I, 581b, 585b : bucca]

"Bouche"

A. -

[Par rapport au domaine de l'alimentation]

 

1.

[En tant que siège du goût] : Le mur de ceste eglise et la cloyson est le corps qui contient l'ame. Les portes et les fenestres et verrieres sont les V sens corporelz, les yeulx, les oreilles, la bouche et autres. (GERS., Purif., 1396-1397, 63).

 

2.

[En tant qu'organe par lequel transite l'alimentation]

 

-

Mettre la main à la bouche. V. main

 

-

P. méton. Pour sa propre bouche. "Pour sa propre consommation" : Aussi je vuil que mon [dit] pourveour achate contre le feste de Pasques floree prochain que vient, pour ma propre bouche, quatre tonelx de bon vin vermaille, et ce du millour que pourra estre trouvee en tout ce païs, car adoncques je ferai un grant mangerie. (Man. lang. G., 1396, 49).

B. -

[En tant qu'organe de la parole]

 

1.

Dire/parler de la bouche : ...elle [la pauvre âme] veult user des yeux pour regarder aucune vanité, mais elle lez treuve clos et obscurs ; elle quiert prandre aucun confort par se complaindre et parler de la bouche, ou par gouster aucune doulce viande elle treuve les dens serrez et la langue amortie. (GERS., Pent., p.1389, 85). ...et puis affin que tu ne desesperes il reuient a toy et te donne reconfort. Vraiement il dit bien par la bouche de salomon : Delicie mee esse (...). Dit nostreseigneur : mes plaisances sont estre auecques les hommes et me ioue et mesbas auecques vous sur la terre. (CIB., p.1451, 189).

 

-

[P. allus. au Ps. LXXIII, 9] Mettre sa bouche au ciel/es cieux. "Parler à tort et à travers" (Éd.) : Avant, donques, que vous mettés la bouche es cieux, regardés les Registres et lez Hystoires tres approvés de saint Charlemaigne, et lez feulletés bien, si trouverrés que le royaume de France puet estre appellé Empyre, et le Roy Impereur (Songe verg. S., t.1, 1378, 56). ...laquelle puissance luy fust donee de Jhesuchrist, quant il luy dist que il pait sez ouailles, et que celluy que il liret en terre, seret lié es cieulx. De laquelle plaine puissance nul ne doit doubter, car ce seroit mectre sa bouche ou ciel. (Songe verg. S., t.1, 1378, 96).

 

Rem. Cf. DI STEF., 89a, s.v. bouche

 

-

Mettre son doigt à sa bouche. "Se taire" : ...par le commandement de la verge de ma maistresse de cy en avant je mectray mon doy a ma bouche, et si tiendray silence et laisseray la parolle a ma suer ainsnee (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.1, c.1386-1389, 508).

 

2.

[Pour se confesser] : Oiseuse est la fole qui enseigne toutes follez abhominations et telles que on ne les ose dire, de quoy avient que confession s'en empesche, et trebuche la personne, a bouche close, a dampnation. (GERS., Annonc., a.1400, 236).

 

3.

[Pour prier ou louer Dieu] : O benoit Dieu glorieux, n'est entendement qui peust cest honneur concevoir ne bouche reciter ! (GERS., P. Paul, a.1394, 483). ..le saint ange Gabriel (...) dit le salut proposé : Ave, Maria. Et combien que le mistere du jour d'uy soit tel et si parfont que nul ne le pourroit comprendre ne de bouche exposer, touteffois j'en diray en brief IIII verités ou considerations (GERS., Annonc., a.1400, 229). Notez de celuy qui tousdiz disoit : "Ave !", et une fleur de liz luy creut en la bouche. (GERS., Annonc., a.1400, 237).

 

4.

[En cooccurrence, positive ou négative, avec coeur] : Riche Precieuse, Verite la royne, de bouche et non de cuer nous recognoissons nostre deffaulte, et veoyons nostre ruine, nostre pauvrete et nostre laide figure, nostre infortunite et nostre maleurte. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.1, c.1386-1389, 271). Concluons que ce traitre flateur ne nous gette en excommeniement, affin que nous, en saluant Nostre Dame, soions d'elle resaluez, quant nous disons de cuer ou de bouche : Ave, Maria, gracia... (GERS., Annonc., a.1400, 236). Qui est la bouche qui pourroit dire, ou cuer comprendre la divine leesse que vous receutes au jour d'uy, Mere de Dieu glorieuse ? (GERS., Noël, p.1404, 291). ...par ce nous est monstré que en donnant gloire a Dieu nous devons eslever noz cuers et noz penseez a Dieu la sus, non pas luy donner gloire de bouche seulement, comme font ceulz qui en disant leur patenostre ou autre oroison, ou en oyant la messe ou sermon, ont le cuer tousjours a terre, c'est a dire a pensee terrienne, orde ou charnelle, ont le cuer en la cuisine, comme on seult dire. (GERS., Noël, p.1404, 299).

 

Rem. Cf. G. Hasenohr in : Grundriss der romanischen Literaturen des Mittelalters, VIII-1, 1988, 304 : «la distorsion entre prière de bouche (seule requise des simples gens) et prière de coeur (apanage des contemplatifs), aggravée par la généralisation de la récition des Heures en latin».

 

-

[P. oppos. à coeur qui n'est pas exprimé] Ami de bouche. "Celui qui se dit ami de qqn sans l'être véritablement" : C'est le bon amy qui oncques ne faillit au besoing, qui oncques ne reproucha son amour, qui requiert de son amie fors estre amé seulement, et non pourquant tres habondamment guerdonnee. Ce n'est pas icy l'amy de bouche seulement, l'amy de bras, l'amy de bourse, l'amy de court (GERS., Concept., 1401, 409).

 

5.

[Susceptible de commettre des péchés] : Des pechiéz de la bouche. (Somme abr., c.1477-1481, 91).

 

-

P. méton. "Lèvres" : ...l'une [des pierres précieuses] de telle efficace, après qu'elle fut mise sur le bort d'une couppe d'or à l'endroit où l'on beuvoit, que souldainement, se aucun homme qui eust faulté ou rompu son mariage, sa bouche se souldoit et prenoit, comme si les levres feussent d'une piece. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 34 r°).

C. -

P. anal. "Ouverture, entrée (de qqc.)" : Exemple. Soit le puis .a.b.c.d., .a.b. le dyametre de la bouche et .c.d. la profundeur que vous voles mesurer (FUSORIS, Gnomo, éd. G. Arrighi, c.1407-1412, 346).
 

Littérature didactique Hiltrud Gerner


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