Dictionnaire du Moyen Français (1330-1500)

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     LANCE1          LANCE2     
FEW V lancea
LANCE, subst. fém.
 

"Lance" : Et quant il estoit bien armez, Bien montez et bien acesmés, La lance eu pong, l'escut au col, Il n'i avoit sage ne fol Qui ne deïst à grant murmure : "Cils roys fu nez en l'armeüre ;" Tant estoit gens, joins, lons et drois, Hardis, puissans en tous endrois. (MACH., P. Alex., p.1369, 27). Faites nous tres grant pourveances D'escus, de pavais et de lances, Et de toute autre artillerie, Qu'il convient à nostre maisnie, Pour assaillir et pour deffendre, Pour murs brisier et citez prendre. (MACH., P. Alex., p.1369, 53). Et einsi com chascuns descent, Dix se combatent contre cent. Mais onques mais si druement Ne vist homs gresler vraiement, Com lances, sajettes et dars Volent en l'air de toutes pars, Pour nos Crestiens damagier. Mais bien se savoient targier, Car autrement il fussent mort Et occis de piteuse mort. (MACH., P. Alex., p.1369, 69). Il dist au roy : "Viens-tu conquerre Nostre païs et nostre terre ? Je te moustreray ta folie, Ton outrage et ta cornardie." Lors donna au roy tel colée, D'une fort lance bien ferrée, Qu'il le fist reculer IIJ. pas. Li roy li dist : "Tu ne scez pas Encor comment m'espée taille, Mais briefment le saras, sans faille." (MACH., P. Alex., p.1369, 71). Courtoisement leur ottria [le roi aux ambassadeurs égyptiens], Et puis moult bien les festia, Et fist jouster en leur presence Ses chevaliers maint cop de lance. Li Sarrazin se mervilloient Coment il ne s'entretuoient ; Car il sont dou gieu desapris, Pour ce qu'il ne l'ont pas apris. (MACH., P. Alex., p.1369, 126). Prenons chascuns lance ou espié, Et leur courons sus vitement, Tous ensamble et serréement. (MACH., P. Alex., p.1369, 215). [Le pape] Moustra, à bon entendement, Comment on doit son Dieu amer Et son proisme sans point d'amer ; Et comment sa mort pardonna Au faus Juif, qui li donna Eu costel dou fer de sa lance, Et aus autres qui, par sentence, Sans cause, à mort le condampnerent Et en crois le crucifierent. (MACH., P. Alex., p.1369, 241).

 

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[Dans un cont. métaph.] : Et s'Yre ou Despit te lance De sa lance, Recevoir Dois en bonne pacience (MACH., Lays, 1377, 420).

 

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[Lang. de l'amour] : Bonne, belle et bien parée, De tres gentil renommée, Mort ou aligence De vo face coulourée, Qui "tout passe" est appelée, Aten ; car sans lance M'a fait douce blesseüre Vo simple regardeüre (MACH., Ch. bal., 1377, 605). Helas ! dame, vostre tres dous regart Navra mon cuer de l'amoureuse lance, Quant premiers vi vo gent corps que Diex gart ; Si que j'avoie en vous droite fiance D'avoir aucun bon confort. (MACH., L. dames, 1377, 219). ...de la belle ay la veüe Qui me point d'amoureuse lance. (MACH., Lays, 1377, 333). Si me merveil, quant doloir Et complaindre main et soir Voy maint amant et manoir En desesperence. L'un muert d'amoureuse lance Et l'autre ha toute grevance ; L'autre languist en doubtance De pis recevoir. (MACH., Lays, 1377, 452).

 

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Sans lance. "Sans défense" : ...li contes de Tanquarville M'envoia une haguenée Sans selle, à bride renouée, D'un piet et d'un oueil desferrée, Qui est de tous poins aveuglée ; Si que je sui à piet sans lance. Et volentiers iroie en France, Car moult desir que je vous voie. (MACH., Compl., 1340-1377, 262).

 

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Lance seur/sous fautre. V. fautre

 

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Au fig. "Avec impétuosité, rapidement, sans hésiter" : Garde toy ; car lance seur [var. sous f.] fautre, Se [Fortune] vient encontre toy combatre, Pour toy de toute honneur abatre, Sans menasse et sans deffier ; Si que tu ne t'i dois fier, Ne qu'en baston d'un champion. (MACH., R. Fort., c.1341, 88). ...il estoit toudis errans, Puis ci, puis là, dessus les rans, Il s'en venoit lance sous fautre, S'abatoit l'un ci et là l'autre ; Encontre li riens ne duroit ; De son bien chascuns murmuroit, Et se seingnoit de la merveille. (MACH., P. Alex., p.1369, 27). Et dist qu'il s'en voloit combatre A IJ. ou à IIJ. ou à quatre, En IIIJ. jours l'un apres l'autre, Teste armée et lance seur fautre. Et seur cela bailla son gage Au roy, devant tout le barnage, Qu'autre prueve n'i trouveroit, N'autrement ne le prouveroit. (MACH., P. Alex., p.1369, 251).
 

Guillaume de Machaut Noël Musso


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