Dictionnaire du Moyen Français (1330-1500)

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     ÉPÉE     
FEW XII spatha
ESPÉE, subst. fém.
[T-L : espee ; AND : espee1 ; DÉCT : espee ; FEW XII, 140 : spatha]

A. -

[Arme] "Épée" : Et vous meismes, Mere de Dieu glorieuse - mieulx ne vous scay je dire ! -, vous eustes le cuer si doloreux a l'eure de la benoitte passion comme s'il eust esté party d'un glaive ou d'une espee (GERS., Déf., 1400, 220). ...et, au dessus dudit palais, constitua ung chevalier d'arain qui tenoit une espée vibrante, faisant contenance et semblant de menacer icelle partie. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 70 v°).

B. -

[Symbole d'un pouvoir]

 

1.

[de la justice] : ...le roy, qui est juge publique et de Dieu tient l'espee pour faire justice des maufaicteurs, n'osera faire justice des dessusdiz tonsurez (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.2, c.1386-1389, 301). Pieça, dit nostre mere saincte Eglise, regna Justice la glorieuse seant sur son throne espouentable de verité, et tenant l'espee tranchant de vengence et de exterminacion. (GERS., Purif., 1396-1397, 61).

 

2.

[du pouvoir séculier ou spirituel]

 

-

Espée temporelle/espée séculière. "Puissance qu'a la justice laïque de condamner à mort" : Mais depuis que nous eusmes les grans richesses, les grans seigneuries, les citez, les chasteaulx et les forteresses, et presismes l'office de l'espee seculiere, nous, qui par nostre profession evangelique devions estre mors au monde, enpresismes a juger et condempner et faire mourir les vifz. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.2, c.1386-1389, 300). ...et par noz decretales et nouveaux droiz positiz en laissant derriere et comme chose oubliee la code des anciens canons et des huyt conciles generaulx, nous avons dilacte nostre puissance aussi sus toutes personnes seculieres, ouvrans souvent rigoreusement de l'espee temporelle, voire sus forme apparant debonnayre de nostre espee espirituelle. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.2, c.1386-1389, 301).

 

-

Espée spirituelle. "Pouvoir juridique de l'Église" : ...nous avons dilacte nostre puissance aussi sus toutes personnes seculieres, ouvrans souvent rigoreusement de l'espee temporelle, voire sus forme apparant debonnayre de nostre espee espirituelle. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.2, c.1386-1389, 301).

 

-

[Symbole du chef suprême des armées] Espée de France : Cestui [André de Sully] fut baillé audit messire Berthrand le IIe jour d'octobre mil IIIcLXIX, quant l'espée de France lui fut baillée et qu'il fut fait conestable de France (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 143 v°).

C. -

[Symbole de guerre et de violence]

 

-

Loc.

 

.

Mettre l'espée au fourreau. "Cesser le combat, faire la paix" : Et de tout a apris a forgier ledit Blanc Faucon [l. "Sanglier" c'est-à-dire le roi d'Angleterre] couronne a ma precieuse forge, que il a determine par sentence inrevocable de faire mectre l'espee au fourreau de chevalerie, en convertisant les saiectes des ars d'Angleterre a cerfs et a bestes mues et avoir bonne paix au Blanc Faucon, au bec et piex dorez ["le roi de France"] (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.1, c.1386-1389, 399). ...se nostre espee temporelle, trenchant et bien ague, par le jugement de Dieu ne sera refrenee, il n'aura roy ne prince en la Crestiente catholique qui n'ait aucune occasion de mectre s'espee ou fourreau s'il vouldra vivre en paix avec l'eglise a consoulacion. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.2, c.1386-1389, 301).

 

.

(Mettre) à l'espée. "Passer au fil de l'épée, tuer" : ...et y fut tué XL mille hommes et plus et prins mille et deux cens prisonniers et la cité mise en feu, et femmes et enfans tout à l'espée, le premier des kalendes de juillet, l'an XIIIe du resne de Neron (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 74 v°). ...lequel, après plusieurs durs et merveilleux assaulx, la print [la cité de Jaffa] et mist à mort à une foiz XIIm hommes, et XVm captifs, femmes et enfans, jeunes et vielx, mis à l'espée. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 75 r°).

 

Rem. Pour les loc., cf. aussi DI STEF., 301a, s.v. epee.
 

Littérature didactique Hiltrud Gerner


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